Magazine PROF n°2

Dossier À l’école de la citoyenneté

Des bancs et de la crème pour le Sud

Article publié le 01 / 06 / 2009.
Article paru en ligne uniquement.

Des enseignants développent dans le cadre de leurs cours philosophiques des projets de solidarité Nord/Sud. Préférant l’action aux discours moralisateurs, ils pratiquent les valeurs qu’ils promeuvent en classe. Au-delà des clichés, ils nous forcent à relativiser notre regard sur le monde. Et sur nous-mêmes.

Goiás, patrimoine mondial de l’Unesco, au Brésil. Ou Yolo, en République démocratique du Congo. S’assoir sur un banc, s’émerveiller des beautés colorées, humer des parfums enivrants. Et s’enduire de crème solaire. Rêves émouvants.

Comme dans plus de cent autres écoles, ces élèves de Saint-Jean-Baptiste de la Salle, *asseoir à Bruxelles, contribuent à la solidarité Nord/Sud, en vendant des produits Oxfam.

© PROF/FWB

Schaerbeek, Belgique. Le monde riche. La pauvreté. Les moraliens 1030 sont les écoliers de 6^e année primaire du cours de morale des écoles communales. Leur slogan ? « Pour apprendre la solidarité et la tolérance, tendons la main aux enfants d’ailleurs ». Joignant les actes aux paroles, ils ont développé un beau projet de solidarité avec une petite école de Yolo Nord, dans la province de Kinshasa. Avec la complicité de Laïcité et Humanisme en Afrique Centrale (LHAC), ONG de coopération au développement fondée sur les valeurs laïques, ils organisent diverses activités pour financer l’achat de (soixante) bancs. Non de bancs solaires, non ! Des bancs à offrir à cette petite école africaine démunie de tout mobilier. L’une des enseignantes, Hermine Bokhorst, raconte : « Les gamins qui sont un peu brouillés avec l’école revivent. Ils aiment bien aider ! » Des bancs pour s’assoir. Des bancs pour réfléchir ensemble sur des thématiques abordées au cours comme le racisme, les droits de l’enfant ou la pauvreté. Et vivre les beaux principes enseignés à l’école. Le projet des Moraliens 1030 a reçu un des Prix de l’innovation pédagogique au dernier Salon de l’Éducation.

Tendre la main… et agir !

Angleur. Dénoncer la pauvreté dans le monde, c’est bien. Agir, c’est mieux ! C’est le principe d’Éric Grandjean, professeur de religion catholique à l’institut Maria Goretti. En accord avec le décret missions et le projet pédagogique de son école, il a choisi de s’engager concrètement sur le terrain: « À nous d’agir ! » Avec une quinzaine d’élèves en technique de qualification (futures esthéticiennes) et de l’enseignement professionnel (futures coiffeuses), il prépare depuis 2007 un projet de solidarité avec les défavorisés du Brésil. Trois années de travail en collaboration avec des partenaires comme Oxfam et Amnesty International, avec Entraide et Fraternité mais aussi avec Solidarité socialiste. Pour Eric Grandjean, la solidarité Nord/Sud dépasse les querelles de clochers.

En juillet, ses élèves (encadrés par des professeurs et un membre de l’équipe PMS) s’envoleront pour le Brésil avec, dans leurs bagages, un projet d’entraide internationale : rencontre avec des enfants et leurs mères des favelas, réflexion sur le droit des minorités avec les Indiens Toupi Guarani, découverte de la biodiversité à Caldos Novas, échanges sur le thème du recyclage des déchets… On est loin des images d’Épinal !

En citoyens du monde

Outre les traditionnelles activités pour financer ce projet humanitaire, nos citoyens du monde vendent une originale crème hydratante « Goyania » créée par les sections aide en pharmacie et bio-esthétique de l’école, en partenariat avec un laboratoire pharmaceutique. Produit naturel à base de substances brésiliennes et liégeoises, cette crème « de qualité supérieure » respecte l’éthique et l’environnement. Première crème « scolaire » pour hydrater votre peau sans assécher vos finances, elle contribue autant à votre bien-être personnel qu’à renforcer des liens fraternels entre communautés.

S’assoir sur un banc, s’enduire de crème. À Goiás, à Yolo, on est loin des yeux, mais près du coeur. Loin du superflu de nos sociétés de consommation manipulées par les médias et la publicité. De quoi relativiser notre regard sur le monde. Et sur nous-mêmes. Tout le reste n’est qu’illusoire…