Magazine PROF n°38
L'info
Qu’y a-t-il au menu à l’école ? Bien plus que des fruits et légumes
Article publié le 06 / 06 / 2018.
Du potager à la création de jeux en passant par quantité d’activités axées « alimentation » : à l’École Saint-Joseph à Dolembreux, le projet Qu’y a-t-il au menu à l’école ? fait flèche de tout bois.
Une trentaine de projets ont été sélectionnés après l’appel Qu’y a-t-il au menu à l’école ? lancé en juin 2017 (lire « Manger Bouger ouvert à tous ») et reconduit pour 2018-2019 (1). À l’École Saint-Joseph, à Dolembreux, l’aide financière permettra d’agrandir le potager et d’y installer une serre. Fil rouge de toute l’année 2017-2018, le projet permet de donner du sens aux activités d’apprentissage, de la maternelle à la 6e primaire.
Comme le précise Véronique Hanssen, directrice depuis cinq ans, l’école est « une toute petite structure (47 enfants en primaire, 16 en maternel) qui fonctionne en verticalité. Il y a une classe en maternel et trois en primaire (1-2, 3-4 et 5-6). Plusieurs fois par semaine, on mélange les enfants de primaire, soit en groupes de besoins, soit pour les cours d’éveil ou de religion. Le mélange des âges est un booster d’apprentissage, surtout pour les élèves en difficulté ».
Curieux de nature
Au fronton du bâtiment, l’inscription « Curieux de nature » rappelle que l’école est engagée depuis plus de 15 ans dans une démarche « nature ». « Nous avons pas mal d’enfants à besoins spécifiques, précise Mme Hanssen. Notre projet Curieux de nature les aide encore plus que les autres, parce que ce retour à la terre leur permet de se raccrocher à la scolarité… »
Arrivée à un moment où l’école avait besoin d’un nouveau souffle, la directrice a initié un projet qui a rencontré deux préoccupations actuelles : le soutien aux enfants à besoin(s) spécifique(s) et le désir de retour à la nature. Aux cinq institutrices (deux mi-temps en maternel, deux temps pleins en primaire et 18 heures pour Mme Hanssen) s’ajoutent une institutrice à mi-temps et cinq périodes (dont deux de logopédie) générées par les projets d’intégration.
Dans un tel contexte - verticalité et enfants à besoin(s) spécifique(s) -, le travail collectif s’impose et constitue une condition de réussite des projets transversaux comme Qu’y a-t-il au menu à l’école ? Fin avril, le projet s’est matérialisé par une semaine dédiée à la création de jeux sur l’alimentation, par les enfants répartis en quatre groupes verticaux là aussi. Sans concertation, difficile de proposer à chaque groupe des activités adaptées aux âges et compétences des enfants.
Les jeux créés par les élèves
disponibles à la ludothèque
« Le fil rouge trouve ici une partie de son apothéose puisque les acquis de toutes les activités d’éveil de l’année, sur le thème de l’alimentation, sont réinvestis dans la création de jeux de société », souligne Mme Hanssen. Ces jeux seront remis à la ludothèque de Sprimont et pourront donc être prêtés aux autres écoles…
Ici, un groupe peaufine un jeu axé sur la chaine alimentaire. Là, en sous-groupes, on finalise les cartes d’un jeu destiné à apprendre le vocabulaire des fruits et légumes. À l’étage prend forme un « trivial pursuit » appelé La pyramide élémentaire tandis qu’un groupe met la dernière main au plateau de jeu des Aventures des fruits et légumes.
Au-delà des activités d’éveil, les écoliers ont également dû lire, se documenter, et écrire les règles des jeux et d’autres éléments. Et le spectacle de fin d’année sera bien entendu axé sur l’alimentation.
L’autre gros morceau du projet, c’est le potager (qui sera agrandi) et la serre. Elle permettra dès l’an prochain de suivre tout le cycle, du semis à la récolte et même à la cuisine, puisqu’il est prévu qu’un repas mensuel soit préparé avec les légumes cultivés. Qui dit cuisine dit recettes : le projet prévoit de créer un livre de recettes, et si possible chaque semaine un bol de soupe issue du potager plutôt que proposée par des parents…
Enfin, la dimension intergénérationnelle du projet s’accentuera à mesure que les enfants travailleront le potager. « Il y a déjà des grands-parents très impliqués, et notre souhait est aussi de travailler avec la maison de repos proche de l’école », souligne Mme Hanssen pour qui « ce genre de projet, pour une école comme la nôtre, c’est du pain béni… »
Didier CATTEAU
(1) Candidatures à rentrer pour le 15 juin (http://mangerbouger.be/Appel-a-projets-56190?rub_racine=oui&ecoles=oui)
Manger Bouger ouvert à tous
Créée en 2006, la plateforme http://www.mangerbouger.be de l’ASBL Question Santé peut accompagner toute école désireuse de développer un projet basé sur l’amélioration de l’alimentation, depuis sa définition jusqu’à sa concrétisation.
En plus de cet accompagnement progressif, ouvert à toutes les écoles, l’appel Qu’y a-t-il au menu à l’école ? a été lancé pour 2017-2018 via la circulaire 6190 (http://www.enseignement.be/circulaires).
Il a permis d’octroyer un maximum de 3 000€ aux projets sélectionnés. Outre celui de Dolembreux (lire ci-contre), vingt-deux autres projets ont été sélectionnés.
Il s’agit des projets des Écoles communales d’Avennes, de Bovesse, de Braives, de Comines-Warneton, de Fallais, de Gaurain, de Lustin-Profondville, de Meux, de Saint-Ode ; des Écoles Robert Brasseur (Liège), Croix Blanche (Bastogne), du Sacré-Cœur (Huy), du Centre (Goutroux), Saint-Martin (Leuze), Saint-Albert (Chênée), Le Ry d’Argent (Rhisnes) ; de l’École maternelle Saint-Martin (Verviers) ; de l’École primaire d’enseignement spécialisé (W-B E) d’Anderlues ; des Écoles fondamentales autonomes de Hamme-Mille, d’Éghezée, de Noville-les-Bois ; de l’École fondamentale Abbé Noël – EFAN (Éghezée).
Repas gratuits en maternel
La ministre de l’Égalité des Chances a réservé une enveloppe de 2 millions € pour financer des projets-pilotes de repas gratuits dans des écoles maternelles à encadrement différencié (classe 1 à 5).
Les candidatures devaient être rentrées mi-mai (1). Fin juin au plus tard, le Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, sur la base de l’examen des candidatures effectué par l’Administration, sélectionnera les projets-pilotes mis en œuvre dès la rentrée 2018 et automatiquement reconduits pour 2019-2020.
L’appel concerne tant des repas préparés au sein des écoles que des repas livrés par des services collectifs externes. Des pouvoirs organisateurs entrant dans les conditions de l’appel et qui ne proposaient pas de repas précédemment peuvent participer.
Six conditions : des repas gratuits tous les jours ; confectionnés dans le respect des normes préconisées par l’Afsca ; équilibrés et sains (conçus en fonction des recommandations de l’ONE) ; de nature à encourager la découverte de saveurs variées ; accessibles à tous les enfants au sein d’une même école ; complétés d’activités éducatives portées par l’équipe pédagogique.
(1) Circulaire 6622 (http://www.enseignement.be/circulaires).
Du potager à l’assiette
À l’Athénée provincial Jean d’Avesne, à Mons, la section horticole fournit fruits et légumes à la cantine, dans le cadre du projet Proxial, qui implique toutes les écoles de l’enseignement provincial du Hainaut.
Comme les autres écoles secondaires provinciales du Hainaut, l’Athénée Jean d’Avesne, à Mons, s’est investi dans le projet Proxial (1), développé par la Direction générale des Enseignements du Hainaut avec pour objectif d’implémenter une alimentation durable dans ces écoles via le système de management Agenda 21 scolaire. L’Athénée ayant une section horticole et une cantine, il était assez naturel qu’on y développe un projet intégré, du potager à l’assiette !
Professeure au 1er degré (l’horticulture y figure parmi les activités complémentaires) et en 4e TQ, Céline Danloy a également 15 heures « sans élèves » pour gérer le secteur « maraichage », des collègues étant quant à eux chargés des secteurs « floriculture », « fruiticulture » et « ornement ». Ensemble, ils sont à fond dans le projet, qui s’ouvre à l’extérieur.
Une certification « bio »
« L’idée de départ était de desservir les cuisines des écoles et des mess provinciaux », souligne Mme Danloy. L’absence de véhicule réfrigéré et les contraintes horaires (impossible de livrer les cuisines avant 8h du matin) ont un peu réduit l’ambition. Pour l’heure, les productions de la section (fruits et légumes) alimentent la cuisine de l’Athénée, et/ou sont vendues à l’extérieur.
« On produit des salades toute l’année, parce que nous avons des serres, mais aussi des carottes, pommes de terre, concombres, aubergines, tomates, courgettes… », explique Mme Danloy. « Le gros souci, c’est que tout arrive de juin à octobre, donc nous avons élargi à tous les publics ».
La Province a établi un cadre très clair permettant à la section de vendre des plants (certifiés bio depuis 2017) et des légumes (qui seront certifiés bio fin juin 2018) aux riverains pour privilégier le circuit-court. « Chaque lundi, j’envoie un courriel avec la liste de ce qui est disponible. On reçoit les commandes le mardi au plus tard, les élèves les préparent et les clients peuvent venir les chercher du mercredi au vendredi ».
Préparation et vente permettent aux élèves d’intégrer d’autres matières telles que les mathématiques, les sciences, la citoyenneté,… « Ça donne du sens aux apprentissages, relève Mme Danloy. On vend aussi du bio aux maraichers. L’un d’eux vient de nous acheter six-cents plants de tomates ». Livrer un professionnel constitue une motivation supplémentaire…
Restait la question des vacances scolaires. Si Céline Danloy passait systématiquement au moins une fois par semaine, ce n’était pas suffisant pour entretenir l’hectare de terrain ! « Avant, entre septembre et novembre, avec les élèves on ne faisait que tout remettre en ordre avant d’utiliser à nouveau les parcelles », se rappelle-t-elle.
Trois pistes ont été trouvées. D’une part, en collaboration avec la Fondation SUSA, de jeunes adultes autistes viennent tous les mercredis, été compris, ce qui permet par ailleurs aux élèves de la section d’avoir un autre regard sur le handicap. « Et on a vu la différence de comportement », observe Mme Danloy.
De plus, durant l’été, deux étudiants à mi-temps se chargeront d’assurer la préparation des commandes et la vente des produits. Enfin, la cuisine de l’Athénée ne ferme que durant trois semaines. Le personnel profite de l’été pour conditionner les fruits et légumes qui seront utilisés durant l’automne…
Le personnel de cuisine a été formé
« Quand le projet Proxial s’est mis en route, la première étape a été la formation du personnel de cuisine, par l’ASBL Bio Wallonie, se souvient notre interlocutrice. De fil en aiguille, il a paru naturel d’impliquer la section horticole… »
Bien sûr, la certification bio a généré des contraintes : « C’est parfois plus difficile de trouver des matières premières, reconnait Mme Danloy. Il y a moins de revendeurs bio, les conditionnements sont plus petits et on ne trouve pas tout. Les racines de chicons, par exemple, au lieu de les avoir ici tout près, je vais les chercher à Ittre… » Pour ce qui est du travail de maraichage, il n’y a eu que quelques adaptations : « Il y a quelques produits qu’on ne peut plus utiliser ; on ne pouvait déjà plus utiliser de pesticide ; et il faut du terreau bio. Mais c’est tout… »
Prochaines étapes ? Accroitre la visibilité du projet. Organiser davantage de rencontres avec des maraichers. Agrandir les surfaces cultivées et diversifier les productions, parce que la section avait volontairement réduit la voilure pour améliorer la qualité du travail. Et pour y arriver, pas de secret : une direction qui soutient le projet, une équipe motivée, et du temps…
D. C.
Good Food à Bruxelles, Les cantiniers en Wallonie
« Un menu durable de A à Z » : voilà le défi relevé par le chef Cédric Castus et la douzaine de participants à la formation pratique organisée fin avril par l’ASBL Bio Wallonie pour le compte de Bruxelles Environnement, dans le cadre de la stratégie Good Food (1).
Constatant que 40% des repas pris à Bruxelles le sont dans des cantines, cafés ou restaurants, la Région de Bruxelles-Capitale a initié officiellement cette stratégie en 2015, avec des objectifs pour 2020 ou 2035.
Mais depuis 2008 déjà, Bruxelles Environnement propose un programme « cantines » pour accompagner leurs gestionnaires : suggérer des alternatives aux protéines animales, des menus de produits locaux et de saison, et réduire le gaspillage alimentaire. Deux labels ont été créés, dont le label Cantine Good Food, à trois niveaux (1 à 3 « fourchettes »).
C’est dans le cadre de ce programme que Cédric Castus était invité à partager son savoir-faire avec les participants, venus de cantines diverses : CPAS, crèches, Service public bruxellois, école, et même la Chancellerie du Premier ministre.
Au menu, une dizaine de recettes « alimentation durable » élaborées en duos, avec des produits locaux, pas toujours bio : gâteau à l’orange à base de polenta, pesto de menthe sucré, granola salé, sauce aigre-douce « maison », boulettes de volaille cuites à la vapeur, bettes à l’ancienne,…
En Wallonie, un mouvement similaire, baptisé Les cantiniers (http://www.lescantiniers.be) a été enclenché en 2016 à destination de toutes les cantines wallonnes. Là aussi, il s’agit d’un accompagnement dynamique et interactif en alimentation durable.
Par ailleurs, la Fédération Wallonie-Bruxelles a lancé (circulaire 6629) un appel à projets comportant deux volets. Le premier reconduit Qu’y a-t-il au menu ? (lire en pages 4 et 5). Le second s’adressait aux écoles disposant d’une cantine et de personnel de cuisine, et se terminait le 1er juin. À la clé : un accompagnement personnalisé réalisé par des opérateurs reconnus.
Les projets sélectionnés durant l’été bénéficieront d’un soutien financier (maximum 3000€), mais rien n’empêche les autres écoles de s’engager dans une démarche similaire en profitant des outils mis à leur disposition sur http://www.mangerbouger.be/ecoles.
D. C.
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