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Magazine PROF n°17

 

Dossier LeTBI, un tableau blanc, informatisé, intelligent ou interactif?

Le TBI : un tableau blanc, informatisé, intelligent ou interactif ?

Article publié le 01 / 04 / 2013.

Le tableau blanc interactif (TBI) est encore peu utilisé en Fédération Wallonie–Bruxelles, mais l’intérêt des écoles augmente. Après avoir rappelé ce qu’est le TBI, notre dossier se centre sur son impact pédagogique, sur ses atouts et ses limites. Dans ces pages, on découvrira aussi les critères d’un bon investissement et deux expériences d’utilisation du TBI en classe.

En Belgique, le tableau blanc interactif fait une entrée progressive dans les classes depuis 2005 et connait, depuis un an, un effet de mode : le réseau d’enseignement organisé par la Fédération Wallonie–Bruxelles vient d’en acheter une trentaine, la Ville de Bruxelles une cinquantaine. Bien d’autres pouvoirs organisateurs ont franchi le pas. Plusieurs écoles ou hautes écoles l’utilisent dans le cadre des projets École numérique. Et la demande de formation à un usage pédagogique du TBI augmente auprès des réseaux ou de l’IFC.

Le TBI en classe : les avis sont partagés.
Le TBI en classe : les avis sont partagés.
© PROF/FWB

Le TBI est un écran blanc tactile associé à un ordinateur et à un vidéoprojecteur. L’utilisateur intervient sur l'écran avec un stylet électronique ou par simple toucher, selon les modèles. L'écran interactif transmet alors les diverses informations à l'ordinateur dont l’écran s’affiche sur le tableau blanc grâce au vidéoprojecteur. Il est donc possible d'effectuer sur l'écran projeté au mur tout ce qu'on peut réaliser avec une souris.

Le TBI se déploie

Fin 1988, le premier TBI – appelé Liveboard – a été développé au Xerox Parc, le centre de recherche de la firme Xerox. En 1991, la société canadienne Smart en commercialise un premier modèle. En 1997, Promethean, créée par des enseignants anglais, se lance. Depuis, le marché s’est élargi à bien d’autres firmes. Cet outil s’est très bien déployé aux USA, au Mexique, en Espagne, ainsi qu’en Grande-Bretagne, où toutes les écoles primaires en sont équipées (8 TBI en moyenne par école) et 98% des établissements du secondaire (22 TBI en moyenne). En France également, le taux d’équipement progresse, comme le souligne Apprendre autrement à l’ère numérique, le rapport de la Mission Fourgous pour les TICE (1) : en 2010, 50 000 TBI ont été installés, contre 27 000 en 2009, portant de 5 à 10% le nombre de classes équipées, dans les collèges et lycées. En Wallonie, une récente enquête de l’Agence wallonne des télécommunications évoque 2 000 unités pour 270 fin 2009. Ces TBI sont surtout présents dans le secondaire. Près des deux tiers des établissements y disposent d’au moins un TBI pour un taux de un pour cinq dans le primaire. Globalement, 10 %des établissements disposent d’un unique TBI et 10 % en possède entre deux et quatre (2).

Une concentration d’usages

Cet équipement permet différents usages. Certains l’utilisent comme un tableau classique ou comme support de projection. Mieux vaut dans ce cas s’abstenir d’un investissement important et continuer avec le tableau noir et le rétroprojecteur !

Rencontre de l’ordinateur, d’un logiciel et du grand écran, le TBI permet aux enseignants de sublimer le tableau classique : annotation du document projeté, soulignage de texte, enregistrement des annotations, porte ouverte à d’autres logiciels et à d’autres ressources via la connexion permettant à l’enseignant d’avoir accès au savoir, mais aussi de réaliser une recherche à partir d’une situation–problème, d’émettre des hypothèses et de les vérifier. Le tableau devient informatisé ou intelligent.

Enfin, ce tableau est aussi interactif, lorsqu’il est davantage tourné vers les élèves, à partir du moment où l’enseignant prend cet outil en main avec eux et qu’il devient un outil de classe orienté vers la résolution de problèmes, la recherche, l’exposé de travaux, l’enseignement différencié,…

En débat

Cet outil essuie des critiques. Comme le souligne Bruno Devauchelle, formateur-chercheur au Centre d'Études pédagogiques pour l'Expérimentation et le Conseil à Lyon, « à chaque fois qu’un objet technique numérique apparait, on assiste au même discours, relayé par des médias portés par l’air du temps qu’il ne faut pas manquer, accompagné par des financeurs qui y voient un supplément de vitrine de modernité » (3). L’enseignant et blogueur québécois François Deslauriers, lui, considère le TBI comme une véritable « arnaque ». La charge est lourde : il ne fait pas gagner de temps ; placé devant le TBI, l’enseignant empêche les élèves de le voir ; il coute cher ; il est moins rapide qu'une souris et un clavier ; son logiciel pédagogique peut s'utiliser sans lui ; il encourage des méthodes archaïques et désuètes (4).

D’autres acteurs soulignent certains impacts purement physiques. Selon Fabrice Huin, formateur au sein de la Formation en Cours de Carrière (FCC), l’impact d’une lampe classique en plein regard de l’usager du TBI équivaut à celui du soleil ! Une étude réalisée en France, en 2010–2011, recommande d’incliner le TBI de quelques degrés pour un meilleur confort visuel, de choisir une mise en forme justifiée des textes, et, afin de maintenir l’attention des élèves, de diversifier les tâches ou de réduire le temps d’utilisation des TBI pour une même activité à 45 minutes maximum (5).

Le TBI, comme les autres TIC, n’est pas innovant en lui-même. « Ce sont les pratiques en amont que les TIC peuvent favoriser ou dynamiser qui le sont, explique l’enseignant–écrivain Bernard Collot. Dans tous les cas il faut qu’enseignants et enfants se les approprient » (6). Le formateur belge Pascal Dewaele ajoute que « les TIC sont présentes dans le monde. Nos élèves y baignent. Les utiliser au cours rend l’enseignement moins agressif, moins hostile. Et, s’il faut passer par là pour sauver des élèves en plus, j’étais, je suis et resterai prêt à le faire ».

Des élèves plus performants ?

Sur les impacts éducatifs du TBI, le Pr Thierry Karsenti (Université de Montréal), associé à deux chercheurs, Simon Collin et Gabriel Dumouchet, estime que si « de nombreux écrits sur les TBI existent, […] très peu ont cherché à mesurer les avantages sur la réussite éducative des élèves. Il arrive même que les avantages mis en l’avant dans les études soient contradictoires avec les modalités pédagogiques actuelles. Un des avantages d’un outil dont on promeut l’achat en éducation est qu’il contraint l’enseignant à être… devant la classe. N’y a-t-il pas là plutôt un danger réel de (re)tomber dans la pédagogie expositive ? » (7). Il ajoute : « Comme le faisait remarquer Türel (8), rien, jusqu’à présent, ne permet de conclure à son impact positif sur la réussite éducative. Au contraire, pour lui, les nombreux problèmes techniques et le soutien technique inadéquat seraient susceptibles de miner la motivation des élèves et des enseignants ».

Mônica Macedo–Rouet, spécialiste française des TICE au Centre national de documentation pédagogique, estimait aussi, en 2005, que le TBI n’améliorait pas les résultats des élèves aux examens. En 2010, elle en parlait autrement : « Les résultats d’études récentes montrent une corrélation positive entre son usage et les résultats scolaires des élèves. Un facteur-clé est présenté : le temps d’expérience des enseignants » (9).

Avec Bruno De Lièvre et Gaëtan Temperman, la chercheuse Natacha Duroisin (UMons) a réalisé une étude comparative qui montre l’impact positif sur les élèves d’un usage du TBI partagé avec ces derniers (lire « Interaction rime avec partition ») : « Si les premières études relatives à l’utilisation du TBI et de ses effets indiquaient que ce support n’induisait pas de différences en termes de performances chez les élèves, de récentes études, dont celle que nous avons menée, reviennent sur ces résultats. En effet, nous avons pu remarquer une amélioration des performances des élèves quand le TBI est partagé. Les différences de résultats entre ces études peuvent être expliquées par le fait qu’à l’arrivée des TBI, les pratiques et comportements des enseignants n’étaient pas forcément en adéquation avec les possibilités de l’outil. La réflexion pédagogique relative à ce support a donc été, au fil des années, approfondie et étoffée ».

L’essayer, c’est l’adopter

Bref, comme d’autres TIC, le TBI n’est que ce qu’en fait l’enseignant, une fois qu’il surmonte ses appréhensions, qu’il y consacre du temps et trouve un budget pour (faire) acheter l’équipement. Le débat sur son impact n’est pas clos. Le jeu en vaut–il la chandelle ? Pour répondre, il faut d’abord laisser des enseignants expérimenter l’outil. « Celui-ci n’a de limite que celle de la créativité de l’enseignant, déclare Philippe Vanbellinghen, enseignant au Lycée Sainte-Croix et Notre-Dame, à Hannut. Je vois la même matière qu’avant, mais avec plus de temps pour m’occuper des élèves en difficulté. Et, pour les élèves à besoins spécifiques, l’outil est extraordinaire. En tous cas, l’essayer, c’est l’adopter : les collègues qui l’ont fait ne savent plus s’en passer ».

(1) http://www.missionfourgous-tice.fr
(2) Cette étude vise l’équipement informatique des écoles mais aussi les usages des enseignants. Ses résultats seront publiés en juin sur http://www.awt.be
(3) http://bit.ly/15A4EYb
(4) http://www.deslaure.com (> rechercher « TBI »)
(5) http://bit.ly/X0EM4N
(6) COLLOT B., « Du stylo bic aux tableaux numériques, pour qui ? Pour quoi ? », http://bit.ly/XAKRSb
(7) KARSENTI T., COLLIN S., DUMOUCHEL G., « L'envers du tableau : ce que disent les recherches de l'impact des TBI sur la réussite scolaire », http://bit.ly/UPtm3M
(8) Dans TUREL Y., « Developing teachers’ utilization of interactive whiteboards », dans Gibson D. et Dodge B. (dir.), Proceedings of Society for Information Technology and Teacher Education International Conference 2010, p. 3049-3054.
(9) http://bit.ly/YGMpuY et http://bit.ly/17mzZxt