Magazine PROF n°28
Coté psy
Un filet anti-harcèlement
Article publié le 01 / 12 / 2015.
Contre le harcèlement dans les écoles, les services d’aide aux jeunes situés à Mouscron se mobilisent autour des écoles.
À Mouscron, le cyber-harcèlement ne passera plus ou… plus difficilement. Tous les services qui peuvent venir en aide aux jeunes dans ce domaine se sont réunis en une Cellule d’Actions Solidaires contre le Harcèlement (CASH), pour mettre en route une stratégie. Autour de la table se trouvaient les centres PMS des trois réseaux d’enseignement, l’AMO Le Déclic, le planning familial La Passerelle, le Pôle égalité des chances de la Ville, le Pôle psychosocial de la police et le Service de médiation scolaire (1).
Du CASH
Cette cellule a analysé le phénomène et pris conscience de son ampleur. D’autre part, elle propose depuis octobre aux jeunes, à leurs parents et aux écoles, un plan d’action pour soutenir les victimes et pour lutter contre le harcèlement et la diffusion d’images non appropriées sur les réseaux sociaux.
Concrètement, le CASH a mené en octobre une campagne d’affichage dans toutes les écoles secondaires de la Mouscron qui, ensemble, comptent près de 6500 élèves. Ceux-ci ont tous reçu un document d’information à coller dans leur journal de classe. « Il comporte les numéros des différents services d’aide, explique la directrice d’un centre PMS, et l’an prochain il sera imprimé d’office dans le journal de classe ».
Un guide d’intervention
Les directions d’école et les équipes éducatives, elles, ont reçu un véritable guide pour gérer au mieux les interventions. Enfin, un feuillet d’information à destination des parents, en cours d’élaboration, sera bientôt à disposition dans les centres partenaires de l’opération et les écoles.
« De plus, la Passerelle se tient à la disposition des écoles pour faire des animations en classe, continue la psychologue. Le Service de médiation scolaire propose à des groupes de professeurs une sensibilisation à la gestion des situations de harcèlement et de violence. Le Pôle égalité des chances dispose d’une animation sur l’approche du mécanisme ‘stéréotype-préjugé-discrimination’, qui permet aux jeunes de se sentir plus responsables des conséquences de leur comportement ».
Dans la proposition de procédure d’intervention, l’équipe invite notamment à rester très prudent et à éviter toute prise de position tant que la situation n’a pas été éclaircie ; à gérer au mieux la communication dans le respect des droits à la vie privée ; d’activer rapidement le centre PMS et/ou la Médiation scolaire qui travailleront en concertation ; de prévoir vite une visite des parents pour les informer et les conseiller. « Dans les situations imposant une information auprès de la Justice, nous encourageons les parents et le jeune à porter plainte, par exemple ». On informera aussi bien sûr le pouvoir organisateur, un éventuel service juridique, les enseignants, les éducateurs, en fonction de la situation…
De l’expérience
Ces partenaires proposent ces ressources sur base de leur réflexion et de leur expérience. Celle-ci est liée notamment à deux éléments. Le premier est un incident en 2013 et ses suites. Des jeunes mettent en ligne sur un réseau social des photos dénudées d’une élève. Anne Simon, la directrice du 1er degré autonome du Collège Sainte-Marie : « À la découverte des faits, nous avons travaillé de concert avec notre centre PMS et le Service de médiation, puis avec les parents et enfin la police et le parquet. Ensuite, nous avons proposé à nos cinquante enseignants d’exclure deux garçons, d’en réintégrer deux, ainsi que la victime, clairement manipulée ». Pour prévenir tout dérapage, le médiateur a réalisé une animation-flash dans toutes les classes.
L’école n’en est pas restée là. Avec d’autres partenaires, elle a organisé une journée d’animation sur le harcèlement numérique : « Il fallait transformer le négatif en positif, poursuit Mme Simon, en réalisant une opération de prévention vers les élèves, les enseignants,… les parents ».
16-zam
Autre élément d’expérience : depuis plusieurs années, les membres du CASH organisent 16-zam, un rallye de découverte ludique des partenaires sociaux pour les élèves de 5e de toutes les écoles secondaires de l’entité (2). « Nous disposons d’une particularité, explique la directrice d’un centre PMS. La ville n’est pas très étendue mais présente une densité importante d’écoles et de services ».
Bref, par rapport aux situations de crise liées au harcèlement, les partenaires sociaux mouscronnois ne se contentent pas d’offrir une intervention en urgence après les faits, mais ils disposent d’un véritable filet de prévention construit et cohérent.
Patrick DELMÉE
(1) Contact : 0474 / 81 08 91.
(2) http://projet16zam.webnode.fr/
« Je suis bouleversée »
« Mon témoignage se veut anonyme. Difficile de parler du harcèlement : un sujet compliqué et encore tabou ! Et je ne tiens en aucune façon à porter un jugement sur quiconque ».
« Professeure depuis 15 ans, attentive et à l’écoute de mes élèves, je n’ai rien vu venir. Cette élève discrète, appliquée, bien intégrée, un jour, en récréation, 500 élèves l’ont huée, menacée, insultée. La cause ? Une rupture amoureuse, presque banale. Mais, l’éconduit a, pour se venger, partagé sur Internet des photos de leur intimité. La jeune s’est absentée une semaine, couverte par certificat. Elle a tenté un retour... Il a duré 2 heures. Depuis, aucune nouvelle d’elle ni de ses parents ».
« J’ai été surprise et bouleversée par la dureté des propos. Ses meilleures amies la condamnaient sans appel. Personne n’a fait preuve d’empathie et n’a essayé de comprendre ce qui avait amené cette jeune fille amoureuse à faire ces photos. Ce qui m’inquiète, c’est la banalisation de ce phénomène chez nos plus jeunes : Pas grave Madame, ça fait le buzz une semaine puis on n’en parle plus… De plus, à ma connaissance, mon école n’a pas pris à l’époque de mesures spécifiques pour lutter contre ce phénomène ».
Quelques ressources
• Le cyber-harcèlement est l’un des thèmes abordés par le dossier À la conquête des réseaux sociaux, réalisé par la Cellule Projets Tice de la Direction enseignement.be On y trouve des ressources et une liste de partenaires qui proposent des outils de prévention et des accompagnements en cas de cyber-harcèlement avéré.
• Des professionnels de différents milieux public (Délégué général aux Droits de l’Enfant, Équipes mobiles, service de Médiation scolaire…), associatif (Université de Paix, Service Droits des jeunes, associations de parents …) et académique se sont réunis au sein du Réseau Prévention Harcèlement. Avec l’objectif de partager informations, pratiques et réflexions autour des problèmes de harcèlement à l’école À leur actif : deux colloques participatifs Des vidéos et documents présentés lors du premier sont disponibles sur http://www.bit.ly/1Q0wMNl
• Un dossier pédagogique Ce qui vous regarde et un DVD (avec un court-métrage, des témoignages) ont été réalisés par l’ASBL Loupiote. Ils évoquent les causes et ls conséquences de la haine en ligne, les moyens de la combattre. Ces outils sont disponibles en prêt dans les Point culture et l’ASBL propose un module d’animation sur l’outil pour les 12-18 ans. Contact : outilpedagogique@loupiote.be ou 02/ 644 41 41.
• BLAYA C., Les ados dans le cyberespace : prise de risques et cyberviolence, Bruxelles, De Boeck, 2013.
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