Magazine PROF n°2
Princes des mots tordus
Article publié le 01 / 06 / 2009.
Face à la dyslexie, le premier pas, c’est de savoir qu’on peut agir, même s’il n’y a pas une façon de faire…
« Dyslexie : trouble durable, significatif et spécifique du langage écrit, cette difficulté ne pouvant s’expliquer par une atteinte sensorielle, une déficience mentale, un trouble grave de la personnalité, une carence éducative ou affective ».
« Moi j’ai toujours zéro à l’écrit et le maximum à l’oral », lâche Julie, 13 ans et aujourd’hui en 1re secondaire. Mais « lire dix lignes, ça me prend dix minutes ». Alors depuis des années, sa maman recopie les notes manuscrites et les scanne pour les intégrer au logiciel d’aide de sa fille (lire " Des logiciels d'aide"). Deux mamans inquiètes à l’aube des secondaires de leurs enfants dyslexiques vont tenter de persuader leur future école d’acquérir le matériel. Pour Tom, 16 ans, c’est trop tard : il a décroché, déprimé, et ne va plus à l’école… Pour ses parents, « c’est l’enfer ».
La dyslexie toucherait 5\% de la population, à des degrés divers. On soupçonne une anomalie dans le développement d’aires cérébrales. En février 2007, l’Inserm, en France, publiait un bilan des données scientifiques sur le sujet (1), mais l’essentiel, ici, est de se centrer sur ce que peuvent faire les équipes pédagogiques.
On ne diagnostique une dyslexie qu’en 2e primaire, après un an d’apprentissage du langage écrit, mais on peut, dès la maternelle, être attentif aux difficultés du langage oral ou d’exécution de mouvements précis. Il est fréquent, mais pas automatique, que ces signes soient annonciateurs de dyslexie. Dont le diagnostic, sur base de tests rigoureux, est essentiel. Car on aura tôt fait, parents ou enseignants, de juger paresseux cet enfant qui échoue là où cinq minutes plus tôt il avait le bon résultat !
Le diagnostic posé, ce n’est pas qu’une affaire de logopédie. La rééducation est indispensable, mais ne « guérit » pas le dyslexique. La difficulté, pour les enseignants, c’est qu’il n’y a pas une façon d’aider les élèves atteints de ce trouble qui se manifeste de façon variable et s’accompagne souvent de troubles associés, mais aussi de talents particuliers. Plusieurs constantes cependant : fournir des documents très clairs et structurés ; apprendre à prendre des notes réduites ; donner des consignes claires, éventuellement lues au fur et à mesure de l’interrogation ; donner plus de temps aux dyslexiques ; les placer face au tableau ; autoriser des travaux sur ordinateur, des dictionnaires orthographiques, des réponses orales…
Sans aménagements, même minimes, ou pire sans reconnaissance du problème, le risque est grand de voir l’élève finir par renoncer à ses efforts qu’il juge vains. En Flandre, les dyslexiques avérés peuvent demander à leurs professeurs d’université d’être interrogés oralement ! Cette année, pour le CEB, les dyslexiques avérés pourront utiliser les outils spécifiques employés tout au long de l’année, et avoir davantage de temps.
Didier CATTEAU
(1) Dyslexie, dysorthographie, dyscalculie. Bilan des données scientifiques, Expertise collective menée en France par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), février 2007.
http://http://www.inserm.fr/thematiques/neurosciences-sciences-cognitives-neurologie-psychiatrie/dossiers-d-information/troubles-des-apprentissages-les-troubles-dys > Pour aller plus loin > Expertises collectives
Des logiciels d'aide
Pour certains dyslexiques, logopédie et double dose de travail ne suffisent pas. Agréé par la Communauté française (qui subsidie son achat par les écoles), le logiciel Kurzweil 3000 (1) lit les textes qu’on scanne : notes de cours, fichiers informatiques… Son utilisateur peut aussi travailler à partir de ces documents : les résumer, les annoter, les surligner. Le logiciel lit ce que l’utilisateur écrit sur son clavier, au rythme choisi. Et on peut ensuite transformer les documents en fichiers audio, à étudier sur baladeur ou MP3 ! Un dictionnaire est annexé au logiciel, qui existe sous plusieurs formes (clé USB ou CD) et dans des configurations variables. L’une d’elles permet à l’école d’équiper six postes de travail et de « prêter » gratuitement six licences aux élèves à qui on les met à disposition. Un bémol : le logiciel ne reconnait pas l’écriture manuscrite.
(1) https://sensotec.be/fr/produit/kurzweil-3000/ . D’autres logiciels sont agréés, notamment CREAlangage version 4.0 (Créasoft Editions) et Sensonaime Puissance Dys et autres logiciels de l’éditeur GERIP. Liste complète : http://www.enseignement.be/index.php?page=25129.
Complément bibliographique
- L’Association de parents d’enfants en difficultés d’apprentissage (http://www.apeda.be) liste une série d’ouvrages, CD, articles… On peut y commander Le Petit guide de la dyslexie. Comment les dépister et les aider en classe ? ou la BD Dyslexie, où est la différence ?, éditée par l’ASBL IPEJ (secretariat@apeda.be ou 10, avenue du Prince Héritier, 1200 Bruxelles). Consulter aussi ses équivalents français (http://www.apedys.org) et canadien (http://www.dyslexiaassociation.ca/francais/ mandat.shtml).
- La revue A.N.A.E. (Approche neuropsychologique des apprentissages chez l’enfant), prépare un n° 104 sur « Les Troubles dyslexiques durant la vie ». http://www.anae-revue.com
- Einstein était dyslexique, hors-série du Ligueur, et le dossier spécial du Journal des Enfants sur la dyslexie sont accessibles via (http://www.soirees-terribles.net/apeda/wp-content/uploads/2013/12/ligueur_einstein_%C3%83%C2%A9tait_dys1.pdf).
- La Fédération de l’enseignement fondamental catholique a réalisé des fiches synthétiques sur les enfants en difficulté d’apprentissage: http://www.segec.be/Fedefoc/pedagogique/enfdiff.htm
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