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Magazine PROF n°22

 

Coté psy 

Peut-on apprendre en jouant à l’école ?

Article publié le 01 / 06 / 2014.

Le jeu a-t-il sa place dans les apprentissages scolaires ? Que peut-il apporter aux élèves ?

Spontané chez le tout jeune enfant, le jeu favorise le développement moteur, affectif, émotif, intellectuel, sensoriel, social,… Dès l’école maternelle, les jeux spontanés, suscités ou dirigés permettent à l’enseignant d’observer et d’orienter ses actions pédagogiques.

Mais dans la suite du parcours scolaire, le jeu se fait de plus en plus discret en classe, souvent confiné – faute de temps pour boucler le programme – aux derniers jours de l’année. C’est peut-être lié à l’essence même du jeu, qui renvoie aux notions de plaisir et de liberté…

Le jeu, au sens large, permet de comprendre l’essence même des apprentissages scolaires.
Le jeu, au sens large, permet de comprendre l’essence même des apprentissages scolaires.
© PROF/FWB/Olivier Papegnies

Le sociologue Gilles Brougère (1) le définit par cinq caractéristiques : le second degré (ce n’est pas la vie réelle), la libre décision d’y entrer, l’existence de règles implicites ou explicites partagées, la non-conséquence de l’activité dans la vie « réelle » et l’incertitude quant à l’issue. Comment une activité sans conséquences sur la vie réelle serait-elle conciliable avec les notions d’efforts et d’apprentissages ? Pour le sociologue, « utilisé en classe, le jeu est instrumentalisé à des fins précises qui n’en font plus un jeu ».

Jeu et apprentissages se rejoignent

Pourtant, le jeu, au sens large, permet de comprendre l’essence même des apprentissages scolaires, c’est-à-dire d’amener l’enfant à développer des compétences, à mobiliser des savoirs, des savoir-faire et des attitudes pour résoudre un problème ou accomplir une tâche. Sylvie Van Lint, chercheuse à la Faculté des Sciences de l’éducation de l’ULB, le souligne : « Comme le jeu, l’apprentissage scolaire vise un sens second par rapport à l’expérience quotidienne (l’école vise un savoir universel). Il exige un engagement intentionnel de l’enfant devenu élève (par libre décision) ».

« Cet élève choisira et articulera les règles (celles du jeu comme celles des savoirs) en fonction de sa stratégie, de ses objectifs. À chaque fois, l’élève comme le joueur devront analyser la situation et s’engager par une action réfléchie car l’issue sera toujours incertaine. Pour permettre cela, l’école, comme le jeu, doit offrir un espace et un temps préservés de conséquences (sans jugement). Le parallèle avec le jeu permet de mettre en évidence qu’apprendre des règles ne suffit pas : il faut apprendre à « jouer » avec les règles, découvrir l’espace de liberté encadré par les règles du savoir et du savoir-faire ».

Et puis, l’enfant joue pour jouer, sans but précis. Il peut donc se laisser guider par la curiosité, mais il aura besoin de l’enseignant pour l’aider à structurer, à mettre des mots sur ce qu’il vient de découvrir. Le joueur est plongé dans un monde hors de la réalité où il peut se permettre d’échouer, d’expérimenter sans risque, sans la sanction de l’échec. Mme Van Lint le souligne : « l’école, par rapport à l’apprentissage sur le terrain, est aussi ce monde préservé des conséquences réelles ».

Un autre atout : dans le jeu, chaque joueur y est incité à agir, à réfléchir en fonction de ce qu’il croit bon de faire pour gagner, mais aussi en fonction des réactions des autres joueurs. En jouant, il agit sur les événements ce qui lui permet d’appréhender des concepts comme la cause, la conséquence, la chronologie, la durée.

Enfin, en jouant, l’élève se mobilise c'est-à-dire qu’il doit non seulement comprendre et avoir intégré les règles, mais surtout se montrer compétent dans le choix d’une stratégie. Pour un jeu portant sur des apprentissages scolaires, l’élève devra appliquer les règles du savoir, les procédures apprises mais aussi choisir celles qui conviennent le mieux, les combiner, les organiser pour résoudre un problème ou une tâche. N’est-ce pas la démarche de toute personne compétente ? Le jeu peut ainsi montrer l’origine des difficultés d’un élève et l’enseignant peut donc lui donner une certaine liberté en lui permettant de progresser à son rythme, en variant règles et exigences.

L’enseignant maitre du jeu

Le jeu peut donc être un moyen éducatif au service d’apprentissages scolaires. Mais pas un outil magique : « Il serait bien naïf de dire « Laissons les enfants jouer, ils apprendront », explique Mme Van Lint. Il faut être attentif au choix de jeu, à la manière de l’exploiter et l’enseignant joue un rôle-clé ».

Car en plus de son rôle d’arbitre lors de désaccords, il doit aussi aider les élèves à prendre conscience de leurs apprentissages. Cela suppose qu’avant le jeu, il précise l’objectif d’apprentissage de l’activité et qu’après, il y ait un retour et des échanges. En verbalisant, en explicitant, les élèves pourront comprendre les stratégies utilisées et les raisons pour lesquelles elles sont efficaces.

Catherine MOREAU

(1) DELORY-MOMBERGER C., « G. Brougère. Jouer/Apprendre », dans L'orientation scolaire et professionnelle, n° 35/3, 2006. https://osp.revues.org/1033

 

Quelques ressources

- BROUGÈRE G., Jeu et éducation, Paris, L’Harmattan, 1995.
- BROUGÈRE G., Jouer/apprendre, Paris, Anthropos, 2003.
- DE GRAEVE S., Apprendre par les jeux, Bruxelles, De Boeck, 1996.
- DE GRANDMONT N., La pédagogie du jeu, Montréal, Éditions Logiques, 1995.
- « Le jeu en classe », dossier paru dans les Cahiers pédagogiques, n°4458, décembre 2006.
- VAN LINT S., REY B. (dir) et CARETTE V. (dir), L'entrée dans les mathématiques à l'école maternelle, FWB/Agers, 2010.
- CAFFIEAUX C., LECLOUX S., VAN LINT S., REY B. (dir), L'entrée dans l'écrit à l'école maternelle, FWB/Agers, 2007. Issues d’une recherche en éducation subventionnée par le Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles, ces deux publications visent les enseignants de 3e maternelle et de 1re primaire. Après l’introduction théorique, elles proposent un recueil d’activités et de jeux qui abordent un ensemble de compétences en mathématique et en français. http://www.enseignement.be > De A à Z > Décolâge > Ressources et outils.
- Le réseau Ludus propose des scénarios de jeux pour les cours d’histoire, de géographie, des fiches, des exemples d’utilisations possibles. http://www.lepetitjournaldesprofs.com/reseauludus/

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