Magazine PROF n°26

L'info 

Des bâtisseurs de cathédrales

Article publié le 01 / 06 / 2015.
Article paru en ligne uniquement.

Le Prix Paola pour l’Enseignement a couronné le projet Bâtisseurs de cathédrale et deux autres projets qui bousculent des habitudes scolaires. Avec la réussite des élèves en point de mire.

Un passant demande à un tailleur de pierre ce qu’il fait. « Je construis une cathédrale… ». Cette réponse ambitieuse, l’équipe éducative de l’École fondamentale Sainte-Famille, à Modave, la cite volontiers pour illustrer son projet.

Le premier prix est allé à l’École fondamentale de la Sainte-Famille, de Modave.

© PROF/FWB

Ce projet, premier lauréat francophone du Prix ^(1), c’est le compagnonnage d’élèves « différents » (souffrant d’autisme, de troubles de l’attention, de trisomie,…) avec des élèves « ordinaires ». Les savoirs se co-construisent : les uns partagent et explicitent leurs stratégies; les différences et les besoins d’adaptation des autres les y aident. « Ce compagnonnage crée un rapport différent aux autres et aux savoirs et un dépassement des normes et de la compétition », explique Bernard Kersten.

Pour le directeur de cette école où l’inclusion concerne le quart de la population scolaire « il n’est pas toujours simple pour les enseignants de travailler en équipe pluridisciplinaire sur un chantier collectif ». Car le projet se construit et évolue en permanence grâce aux réunions d’équipe, aux concertations, aux conseils de classe menés avec des enseignants de l’École spécialisée Les Capucines, de Rochefort, et du personnel paramédical. « Mais les bénéfices sont multiples : dont un énorme enthousiasme chez les adultes et les enfants, et une réduction de l’échec scolaire ».

À l’écoute des neurosciences

À l’École Saint-Martin, à Marcinelle, Marylène Bolle travaille avec l’orthopédagogue Joseph Stordeur dans sa classe de 2 et 3^e maternelle. Objectif : modifier les pratiques en tenant compte des apports des neurosciences ⁽²⁾. « Celles-ci montrent que seules des répétitions fréquentes, sur un laps de temps relativement court, permettraient la construction de traces sérieuses pour les apprentissages, explique M^me Bolle. Au lieu de répartir ses 24 élèves dans différents ateliers, elle travaille les apprentissages avec la classe entière pendant une semaine.

Pour l’apprentissage de la lecture, par exemple, l’institutrice fait écouter une histoire lue, afin que les élèves se créent des images mentales. Chaque enfant essaie de relier les épisodes à ses illustrations individuelles. À la fin de la semaine, la plupart des enfants peuvent raconter l’histoire en s’aidant des indices ainsi construits. « Grâce à cette pratique méthodologique, les enfants fixent mieux les apprentissages et disposent d’outils plus performants pour aborder les apprentissages de 1^re primaire ».

À chaque élève sa clé.com

Le troisième lauréat, c’est le projet La clé.com mené à l’École La Vallée, à Schaerbeek (enseignement spécialisé de type 1). Pour favoriser les apprentissages de sa dizaine d’élèves de 6 à 14 ans, Émilie Libioul utilise des stratégies variées. Dont des repères visuels et sonores (des signaux lumineux de circulation pour régler le niveau sonore du groupe, par exemple), l’expression corporelle pour améliorer le comportement. Ou encore des contrats adaptés à chaque enfant et des renforçateurs (la possibilité d’aller lire à la bibliothèque une fois l’exercice terminé, par exemple). « Certains ont atteint un bon niveau en lecture et pourront gagner en septembre l’enseignement spécialisé de type 1 ou 2 », se réjouit-elle.                                          

Catherine MOREAU

⁽¹⁾ http://www.sk-fr-paola.be
⁽²⁾ Lire aussi à ce sujet l’interview de Joseph Stordeur dans notre numéro de mars-avril-mai 2015.