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Magazine PROF n°29

 

L'info 

Les anciens appelés à mieux accueillir les nouveaux

Article publié le 01 / 03 / 2016.

Un décret de février invite tous les établissements à réaliser au moins un minimum d’actions pour accompagner les enseignants débutants et à leur désigner des collègues référents.

Certains établissements laissent les nouveaux enseignants se débrouiller. Beaucoup les encadrent spécifiquement. Un décret adopté le 4 février par le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles (1) tend à généraliser cet accompagnement, afin de contribuer à réduire les abandons.

Dès septembre, chaque enseignant débutant sera suivi par un référent.
Dès septembre, chaque enseignant débutant sera suivi par un référent.
© Fotolia/WavebreakmediaMicro

Un accueil minimal partout

Le décret rappelle et suggère une liste de mesures à mettre en place : entretien avec le chef d’établissement, visite des locaux, communication des horaires de travail, mise à disposition et explication du projet d’établissement, du projet pédagogique et éducatif, du règlement de travail, des référentiels et programmes de cours en vigueur, pour lesquels le membre du personnel est désigné, et une présentation à l’équipe éducative.

De plus, le chef d’établissement désignera un référent, porteur d’un titre pédagogique et d’une expérience d’au moins cinq ans, afin d’accompagner le débutant dans son insertion et dans l’exercice de ses fonctions. Le texte définit un débutant comme un membre du personnel désigné ou engagé à titre temporaire pour plus d’une semaine pour la première fois dans l’établissement.

Ce décret s’inspire notamment de l’Avis 111 du Conseil de l’Éducation et de la Formation. Il envisage pour l’accompagnement en début de carrière la piste du tutorat « liée non seulement à l’ancienneté, mais surtout à une compétence reconnue ». À la différence du décret, il recommande : « une articulation doit être faite avec la formation initiale et continuée », pour fournir un retour d’information vers les acteurs de la formation et que ceux-ci puissent s’adapter au mieux (2).

Des ressources pour y arriver

« Ce décret laisse les établissements autonomes quant aux modalités de fonctionnement du dispositif », explique Claude Lachapelle, conseiller au cabinet de la ministre de l’Éducation. Il fait suite à une circulaire d’aout 2015 (3) qui appelait les écoles volontaires à préparer de tels dispositifs et invitait les enseignants référents potentiels et les débutants à une séance d’information. Une brochure annexée à la circulaire présente une liste de ressources en la matière. C’était le résultat de la réflexion d’un groupe de travail, nourrie par des expériences de terrain : coaching individuel, groupe d’accueil et d’accompagnement des personnels entrants, mise en place de référents…

Un nouveau métier ?

« Mettre en place des référents, c’est créer une nouvelle professionnalité, de nouvelles compétences professionnelles liées à un métier », expliquent Christophe Dozin et Cédric Ledent, qui ont collaboré à cette démarche. Ils enseignent à l’Institut Saint-Joseph, à Ciney, où ils participent à la mise en place du tutorat depuis plusieurs années.

Le référent partage un ensemble d’informations pratico-pratiques avec le débutant, établit une relation conviviale et de confiance. Les Cinaciens vont plus loin : « accompagner les débutants, c’est leur faire découvrir des gestes professionnels en école, en salle des profs, en classe, en évaluation, dans la posture du praticien qui réfléchit sur ses pratiques au sein d’un travail collaboratif ».

« Accompagner, c’est aussi imaginer une charte de fonctionnement autour de la confidentialité, un contrat avec la direction. C’est déterminer précisément le rôle de chacun : la direction par exemple se retirera de l’accompagnement pour se consacrer davantage à l’évaluation. C’est identifier les besoins du dispositif et des débutants. C’est intervenir à plusieurs en cas de difficulté importante ».

Pour cela, l’équipe doit être représentative des différences facettes de l’établissement (que ses membres doivent connaitre sur le bout des doigts), et ne pas hésiter à découvrir les ateliers de pratique professionnelle, par exemple, où se pratique la différenciation. « En immergeant le nouveau dans la culture de l’école, nous veillons aussi à établir une relation dans laquelle chacun trouve sa place : le référent et le débutant n’ont pas les mêmes disciplines et ne fréquentent pas les mêmes classes afin d’éviter une posture charismatique », expliquent MM. Dozin et Ledent.

« Être référent exige une communication efficace vers les pairs, rendue visible par la direction. La fonction requiert une maitrise de ses pratiques en classe et avec les collègues, des compétences en animation, en écoute active,… ». Selon eux, cela nécessite du temps, de l’investissement et un engagement à se former.

Et les moyens ? Le décret n’en prévoit pas. Ce sera donc aux directions à faire des choix.

« En développant l’accompagnement des nouveaux collègues, répond M. Ledent, les bénéfices sont conséquents. Pour les débutants, l’ancrage identitaire ; pour l’établissement, un personnel (in)formé et une stabilité des équipes ; pour les référents, un développement professionnel. Un gain intéressant pour la transformation des pratiques en Fédération Wallonie-Bruxelles ! Mais sans moyens mis en œuvre pour soutenir cette nouvelle professionnalité ! ».

Le nombre d’inscriptions aux formations pour l’entrée dans la carrière (IFC et réseaux) et pour les référents (réseaux) montre qu’il y a une demande. On lira ci-contre ce que pensent les représentants des associations de chefs d’établissements du fondamental.

Reste que chaque année, une grande majorité des enseignants débutants se sentent vulnérables, peu préparés à la réalité du terrain et sont soumis à un « choc des réalités ». Celui-ci s’accompagne souvent d’un sentiment d’impuissance, de solitude et parfois d’inefficacité (4).

Patrick DELMÉE

(1) Décret portant sur diverses dispositions en matière d'Enseignement du 4 février 2016, http://bit.ly/1piygYe
(2) CEF, Avis 111: Recrutement et entrée dans la carrière des enseignants débutants, 30 septembre 2011. http://bit.ly/21gnL3B
(3) Circulaire 5388 du 28 aout 2015.http://www.adm.cfwb.be
(4) Lire le dossier « Amarrer les enseignants débutants » dans PROF n°7, http://enseignement.be/index.php?page=27203&id=398

Une question d’équipe

Les associations de direction des écoles fondamentales se positionnent par rapport à l’accompagnement des enseignants débutants.

Pour le Collège des directeurs des écoles libres du fondamental, Stéphane Vreux estime que l’accompagnement des débutants est aussi une question d’équipe « avec des inquiétudes sur le changement, la continuité du projet pédagogique, la réaction des parents ». De plus, il se demande quand et comment il va trouver un référent sans heures complémentaires.

Il suggère que l’on renforce les périodes de soutien pédagogique afin de soutenir les référents. Actuellement, on peut en dégager au prorata de trois sur douze périodes de maitre d’adaptation (1), « là où le capital-période est important ». Enfin, il souligne que si le référent doit se former, il existe très peu de moyens pour le remplacer dans le fondamental.

Du côté du réseau Wallonie-Bruxelles-Enseignement, Claire Jockir, co-présidente de l’Association des directeurs des écoles fondamentales estime que « l’accueil se fait automatiquement, dans des équipes plus petites et surtout plus présentes que dans le secondaire, sans nécessaire besoin de formation de référents. Par ailleurs, placer l’accueil dans un décret le rendra-t-il plus performant et surtout plus convivial ? »

(1) Article 21 du décret du 11 avril 2014, http://bit.ly/1QGEMm9 et article 76 du décret du 4 février 2016, http://bit.ly/1QnZ27A

À Couillet, l’accueil des débutants est « positif »

De nombreux établissements n’ont pas attendu le décret pour faire de l’accompagnement des nouveaux enseignants une priorité. Le point sur une initiative développée à Couillet.

Vendredi 19 février 2016. Les huit membres de la Cellule positive du Centre éducatif communal secondaire de Couillet-Marcinelle (CECS) discutent de leur prochain diner convivial entre collègues. « Cette Cellule positive a pour mission d’accompagner les enseignants débutants dans notre établissement, explique le directeur Guy Deravet. Nous avons 625 élèves, répartis sur quatre implantations. Il n’est pas facile d’avoir en un claquement de doigts toutes les informations nécessaires pour y fonctionner ».

À Couillet, la Cellule positive accueille les enseignants débutants avec le sourire.
À Couillet, la Cellule positive accueille les enseignants débutants avec le sourire.
© PROF/FWB

Dès qu’un nouvel enseignant arrive dans l’école, la direction le signale aux membres de la Cellule. L’un d’eux contacte rapidement l’intéressé, lui présente la Cellule, son équipe et son fonctionnement.

Des infos, des infos, des infos…

Questions et informations s’échangent. Au fil des années, elles ont été récoltées dans un document d’une quarantaine de pages. On y trouve le who’s who et le what’s what, mais aussi des réponses à des questions que se pose le débutant. Quels documents présenter lors d’une inspection ? Comment fonctionne un conseil de classe ? Quel est le rôle du titulaire ? Comment organiser une sortie de classe ? Quels sont les points essentiels du règlement d’ordre intérieur ?…

La Cellule organise aussi « régulièrement des réunions ouvertes à tous, sur le temps de midi, explique Patricia Lecoyer, membre de la Cellule. Elles sont l’occasion d’évoquer les difficultés rencontrées ». Elles se passent dans un autre local que la salle des profs. Et aucun membre de la direction n’y participe: « Un principe fondamental de la démarche est la confidentialité. Aucune information ne remonte vers la direction, sauf en cas de situation de danger. Ainsi, la direction est un soutien de deuxième ligne quand c’est nécessaire ».

Avec l’expérience, elles sont aussi l’occasion d’aborder des thèmes tels que le fonctionnement du conseil de classe, ce qui permet de nourrir le guide de l’enseignant à couillet.

De la convivialité

Mais tout est dans tout. « Nous organisons aussi des repas entre collègues et leurs conjoints, ajoute Christine Gillot. Cela favorise la convivialité. Elle est importante dans l’accueil. Ce sont aussi les membres de la cellule qui organisent les inscriptions des nouveaux élèves. Si leur accueil ne se fait pas bien, certains collègues devront nous quitter ».

En septembre dernier, Patricia Lecoyer et Isabelle Loss ont participé à la réunion d’information pour les référents et les débutants organisée par le Cabinet de la ministre de l’Éducation. « Le but était d’abord de pouvoir comparer notre dispositif à d’autres. Ensuite, nous avons également recueilli des informations utiles afin de nous préparer à la mise en œuvre du décret sur l’accompagnement des enseignants débutants ». Et de constater : « Beaucoup d’établissements n’ont pas encore de dispositif comme le nôtre. Et les questions auxquelles répond notre vadémécum recoupent en partie celles que se posent les débutants en général » (lire « Un outil en ligne guide les novices »).

S’adapter au décret

À son retour, la cellule a pris deux décisions: « Nous avons invité un éducateur à nous rejoindre et nous invitons des collègues à devenir référents, explique Mme Loss. En veillant à avoir une représentativité dans les sections et les degrés. Notons que plusieurs enseignants exerçaient déjà cette mission, de leur propre initiative ».

Quand on leur pose la question des moyens, les membres répondent que cela les ravirait d’avoir quelques heures NTPP, mais qu’ils fonctionnent sans depuis sept ans. « Une école est venue voir comment nous fonctionnions, relate Mme Gillot. Lorsque nous avons parlé de bénévolat, leurs oreilles se sont fermées ». Par ailleurs, l’ambiance, soutenue par la direction, s’appuie aussi sur une culture de l’échange et du travail en équipe : « Nous partageons nos cours de façon automatique, commente Mme Loss. Et nous profitons des jours blancs pour préparer en équipe les projets d’années, parascolaires ou pédagogiques, comme la mise en place d’un nouveau programme ».

Les membres de la cellule sont demandeurs d’une formation de référents. Mme Lecoyer : « Jusqu’à présent, nous n’en avons trouvé ni à l’IFC ni au Cpeons. Et les autres réseaux sont assez cloisonnés. Mais une formation pourrait nous donner des ressources sur la posture à adopter dans l’accompagnement et sur la façon d’aborder les débutants qui se replient sur eux-mêmes ».

L’origine

Cette Cellule fonctionne déjà depuis 2009. À l’époque, M. Bengui travaille sur l’ensemble des implantations du CECS. À la lecture d’un article de PROF (1) à propos d’un groupe de paroles entre pairs à l’Athénée Gatti de Gamond, il interpelle la direction sur l’accueil et l’accompagnement des enseignants. Lors de l’assemblée générale de début d’année, celle-ci relaie la question auprès de l’équipe pédagogique et invite plusieurs enseignants à participer à une Cellule positive. « J’y ai invité des enseignants positifs, explique M. Deravet, souriants, dynamiques, participant déjà à d’autres projets, et disséminés dans l’établissement. La plupart ont répondu présents. Lorsque l’ambiance est bonne à l’école, les profs se sentent bien et cela rejaillit sur leur enseignement ».

Patrick DELMÉE

(1) Lire « Pour éviter le burn out ».

L'accueil en groupes de parole

Le Groupe d’accueil et d’accompagnement des professeurs entrants (GAAPE) est né en 2008 à l’Athénée Gatti de Gamond, à Bruxelles. Le principe ? Créer un groupe de paroles entre pairs qui se réunit régulièrement pour analyser les pratiques de celui qui le désire. Il s’adresse d’abord aux enseignants débutants, mais est ouvert à tous les enseignants.

Depuis 2012, Wallonie-Bruxelles-Enseignement a mis en place une cellule qui propose des formations aux écoles volontaires du réseau afin de créer de tels dispositifs locaux (1). Elle compte trois enseignantes-formatrices : Martine Dufrasne, Françoise Meurant et Fatima Jalab. « Notre priorité a été d’aller vers les écoles bruxelloises à enseignement différencié, explique Françoise Meurant. Elles ont quasi toutes un dispositif aujourd’hui ». Cette année, pour répondre à la circulaire qui invite chaque école à désigner des professeurs référents, la cellule a aussi organisé des formations pour les référents, qui seront reconduites la rentrée prochaine.

Pour Mme Meurant, les difficultés des débutants sont essentiellement de nature relationnelle : installer et maintenir une discipline dans la classe, réagir de façon adéquate lors d’un conflit, motiver les élèves… « Ils semblent avoir du mal à trouver la juste distance entre eux-mêmes, les élèves et la matière », ce qui confirme les préoccupations exprimées lors de la réunion d’information organisée fin septembre 2015 (lire « Les anciens appelés à mieux accueillir les nouveaux »).

(1) http://bit.ly/1QFdRUd

 

Un outil en ligne guide les novices

Le Petit Guide du Jeune Enseignant (PGJE) donne une série d’informations relatives au métier (1). Les questions posées par les débutants, lors de la séance informative organisée par le Cabinet de la ministre de l’Éducation fin septembre, y ont sans doute trouvé réponses (2).

Les débutants se demandent par exemple où trouver des informations sur les droits et les devoirs ou le statut. Le PGJE renvoie aux textes légaux qui balisent l'enseignement. Et il explique les règles de conduite à adopter. Par exemple : « Les membres du personnel ne peuvent pas révéler les faits dont ils auraient eu connaissance en raison de leur fonction et qui auraient un caractère secret », comme les énoncés d'examens avant leur passage, les informations communiquées par des agents des centres PMS à l'occasion d'une délibération ou d'une procédure d'exclusion, les informations médicales sur les élèves,.... Il évoque aussi les notions de secret partagé, de devoir de discrétion et de réserve.

Pa. D.

(1) http://www.enseignement.be/pgje
(2) Collectées par l’IFC, elles sont sur http://www.ifc.cfwb.be (> docs réf. > Jeunes enseignants).

Avec Dinamics, l’enseignant débutant s’aguerrit

Pour accompagner les enseignants débutants, la Haute École Louvain en Hainaut a mis en œuvre Dinamics, un projet entre référents et groupes de parole, dans son implantation de Leuze.

Dans l’implantation leuzoise de la Haute École Louvain en Hainaut (HELHa), certains mercredis après-midi, des enseignants débutants et plus expérimentés se réunissent pour évoquer les difficultés du métier quand on le commence. Il s’agit du projet Dinamics, pour Dispositif d’insertion des novices accompagnés de mentors intégrés dans un collectif de soutien. Son animateur est le coordinateur de la catégorie pédagogique, Jean-Marc Vifquin.

À Leuze, de jeunes enseignants se soutiennent mutuellement, encadrés par la Haute École Louvain en Hainaut.
À Leuze, de jeunes enseignants se soutiennent mutuellement, encadrés par la Haute École Louvain en Hainaut.
© Dinamics

L’accompagnement devenu obligatoire

Un décret du 4 février 2016 tend à généraliser un accompagnement minimum des débutants, afin de contribuer à réduire les abandons. Notre numéro de mars 2016 (PROF29)… s’est penché sur la question dans son dossier « Accompagner les enseignants débutants » (http://www.enseignement.be/index.php?page=27203&id=1378). Il explicitait le dispositif des référents déjà mis en place à l’Institut Saint-Joseph, à Ciney, et celui des Groupes d’accueil et d’accompagnement des professeurs entrants (GAAPE), développés dans le réseau Wallonie-Bruxelles Enseignement, par des enseignants de l’Athénée Gatti de Gamond, à Bruxelles. Pour rappel, le décret a invité dès septembre 2016 les écoles à désigner pour chaque débutant un référent déjà expérimenté.

Le dispositif leuzois est différent. « La littérature désigne les groupes que nous avons mis en place pour les agrégés de l’enseignement inférieur (AESI) comme des collectifs de soutien, explique Jean-Marc Vifquin. Ils réunissent des mentors et des mentorés, autrement dit des enseignants en fonction et des débutants. Dinamics est une formule hybride entre le système des professeurs référents et celui des groupes de parole ».

Des mentors externes…

Ainsi, dans le collectif de soutien, le mentor est externe. Alors que le décret demande d’avoir des référents internes. Et que les GAAPE fonctionnent aussi au sein des écoles ou de leurs implantations. « Dans certains cas, le débutant ira moins facilement vers les collègues de son école, notamment pour parler de son sentiment d’incompétence, d’inefficience dans certaines classes. Joue aussi la crainte – la plupart du temps subjective – d’un feed-back vers l’employeur des informations partagées ».

Encadré par le CECAFOC (Conseil de l’enseignement catholique pour la formation en cours de carrière), Dinamics se mène dans une haute école du réseau libre. Mais ce projet est ouvert à des collègues inscrits dans d’autres réseaux. « Certains de nos anciens étudiants travaillent dans d’autres réseaux. Dinamics leur est ouvert. Les anciennes barrières tombent ».

… et jeunes

Autre caractéristique : les mentors sont jeunes. Ils ont quitté la Haute École récemment, il y a 5 ou 7 ans. Ce ne sont plus des novices de la 1re année – selon Delvaux et al. (1), c’est elle la plus critique et on y connait la moitié des abandons des 5 premières années. Mais les difficultés rencontrées à ce moment-là, ils s’en souviennent encore fort bien. Et ils peuvent se mettre facilement à la place de leurs pupilles. Ils sont encore dans ce qu’on peut appeler « la zone proximale de développement ». M. Vifquin : « La collaboration avec un collègue du même âge a pour effet de diminuer le sentiment d’isolement. La relation avec des collègues plus âgés n’est pas la même et la différence est encore accentuée lorsque l’on est engagé dans son ancienne école ».

Les séances des collectifs de soutien ne sont en aucun cas des cours. Elles sont animées par une logique d’accompagnement et de formation continuée à partir des besoins des novices communiqués aux mentors. « On essaie de jouer sur les facteurs pédagogiques, explique le coordinateur. On partage par exemple sans jugement sur la gestion de classe. Les mentors ne se positionnent pas en experts, même s’ils reçoivent une petite formation avant de débuter leur mission. Lorsqu’ils font une étude de cas, ils proposent des pistes, mais ils sont bien conscients que ce n’est pas LA solution ».

Avant de jouer leur rôle, les mentors reçoivent une petite formation. « Ils découvrent notamment le Top 10 des besoins des novices (2), une initiation à la posture à adopter, faite d’écoute, d’humilité, de réflexivité ». De plus, au cours de leur formation initiale, ils ont été formés à l’écoute active. « Ils ont ainsi des éléments pour répondre à l’énorme besoin du novice d’être écouté sur le plan affectif ».

Du maillage, du maillage et encore…

Au fil des séances, mais également dans d’autres contacts plus informels, mentors et mentorés établissent donc un maillage entre eux. Le fait d’inscrire ce dispositif dans une structure d’enseignement supérieur y contribue. La Haute École est un soutien à Dinamics quant à la coordination, la formation, le suivi. Mais les éléments évoqués dans le « collectif de soutien » sont eux susceptibles d’alimenter la formation initiale, et le fonctionnement des maitres de stage. En bénéficient donc les mentors, les novices, les enseignants de la Haute École, ses étudiants.

Ce maillage va plus loin. Des dispositifs semblables existent au sein de l’implantation leuzoise, pour le fondamental, avec l’aide de conseillers pédagogiques. D’autres initiatives du même type ont été prises par d’autres institutions au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Parmi elles, certains de leurs coordinateurs, à l’instar de Jean-Marie Vifquin, participent à un groupe de recherche à l’insertion professionnelle. Lui-même fait partie du groupe de recherche et d’échange sur la formation des formateurs d’enseignants (GREFFE) au sein de l’UCL. « Être chercheurs nous-mêmes – fait rare dans des hautes écoles – et réinterroger en continu ces dispositifs, cela les enrichit énormément. De plus, le maillage donne une dimension d’objectivation dans le cadre des recherches basées sur un échantillon plus large », explique le Leuzois. Ce réseautage a même une dimension internationale, grâce à des rencontres entres chercheurs belges et québécois (3).

Patrick DELMÉE

(1) DELVAUX B., DESMAREZ P., DUPRIEZ V., LOTHAIRE S., VEINSTEIN M., « Les enseignants débutants en Belgique francophone », Les Cahiers de recherche du Girsef n°92, avril 2013.
https://uclouvain.be/fr/chercher/girsef/les-cahiers-du-girsef.html
(2) VEENMAN S., « Perceived problems of beginning teachers » (Electronic version), in Review of Educational Research, 1984, n° 54(2), p. 143-178.
http://rer.sagepub.com/content/54/2/143.abstract
et
DE STERCKE J., DE LIEVRE B., TEMPERMAN G., CAMBIER J.-B., RENSON J.-M., BECKERS J., LEEMANS M. et MARÉCHAL C., « Difficultés d’insertion professionnelle dans l’enseignement secondaire ordinaire en Belgique francophone », dans Éducation et formation, 2010, n° 294, p. 137-148.
http://bit.ly/1TZzrXh
(3) Dans leur ouvrage Quand l’étudiant devient enseignant, (UCL, Presses universitaires Louvain, 2016), Catherine Vannieuwenhoven et Monica Cividini relatent l’analyse de dispositifs et les résultats de recherches en Belgique et au Québec, exposés lors du symposium La transition entre la formation initiale et l’insertion professionnelle des enseignants, à Louvain-la-Neuve, en mai 2014.
http://pul.uclouvain.be/fr/livre/?GCOI=29303100622810

Début de carrière : un écart important entre les attentes et la réalité

L’étude La trajectoire des enseignants en début de parcours, objective les pistes qui expliquent la sortie importante des enseignants de l’enseignement secondaire ordinaire dans les cinq premières années de leur carrière.

En décembre 2015, la Fédération Wallonie-Bruxelles a édité une étude sur  sur les parcours des enseignants débutants (1), réalisée par une équipe de l’entreprise BDO. Sa branche Conseil accompagne des organisations dans l’évaluation ou la mise en œuvre de nouvelles politiques, de nouveaux projets, ou dans la révision de leur fonctionnement (travail et équipes). PROF a rencontré Thomas Gayzal, consultant de BDO spécialisé dans l’accompagnement d’acteurs institutionnels belges à la mise en œuvre de politiques publiques innovantes.

PROF : Qui a commandité cette étude ?
Thomas Gayzal :
L’étude a été commanditée par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Son Comité de pilotage contenait des représentants de la Direction de la recherche, de l’Administration générale de l’Enseignement, de l’ETNIC (Entreprise des Technologies nouvelles de l’Information et de la communication), et des cabinets de la ministre de l’Éducation et du ministre de l’Enseignement supérieur. Elle s’est faite durant la réflexion du Pacte pour un Enseignement d’excellence. Ses travaux ont donc pu être évoqués dans les réunions du Pacte.

Elle fait suite à une étude quantitative menée par l’ETNIC pour le compte de la Direction de la recherche. Selon elle, 25% des départs des débutants se font la première année de leur carrière et, globalement, 40% s’en vont dans les cinq premières années. Le but de notre étude qualitative était de donner des éléments d’explication de ces sorties précoces, les plus objectifs possibles, dans le chef des enseignants, des directions et de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Un mot sur l’échantillon ?
Notre public-cible se composait des 900 enseignants qui ont débuté leur carrière en 2007-2008 et qui ont quitté l’enseignement dans les cinq ans qui ont suivi. Notre équipe en a rencontré cinquante-cinq, quarante en entretiens individuels et quinze dans un atelier de groupe qui nuance les entretiens. La moitié des participants étaient des jeunes sortants, l’autre en réorientation professionnelle. La moitié des participants avaient choisi l’enseignement en second choix. La moitié n’avaient pas de titre pédagogique.

L’hypothèse de départ ?
Nous sommes partis du présupposé théorique suivant. Une personne va être plus encline à travailler avec une organisation si ses valeurs sont en phase avec celles de cette organisation.

Avec le comité de pilotage, nous avons réalisé un référentiel de valeurs générales : contenu du travail, leadership, autonomie, créativité, apport sociétal, atmosphère de travail, réputation, équilibre de vie. Les unes sont intrinsèques (en lien avec la motivation personnelle pour le travail), les autres extrinsèques (en lien avec l’environnement de travail).

Les résultats ?
Les personnes qui se tournent vers la carrière d’enseignant présentent un ensemble motivationnel de départ fondamentalement intrinsèque, centré sur le plaisir que l’enseignant va retirer au travers de son métier, les bénéfices que ce métier peut apporter à la société, tout en conservant un équilibre satisfaisant entre vie privée et vie professionnelle. Mais elles sont peu conscientes des difficultés du début de carrière et des enjeux actuels du secteur.

En prenant la valeur générale « contenu de travail », nous constatons que la valeur spécifique « faire progresser les élèves » est un des aspects les plus motivants du métier à l’entrée. Ou que « évaluer les compétences » est une des valeurs les moins attirantes, tout comme la nécessité d’autonomie et d’initiative propre au métier.

Au niveau des valeurs générales, les principaux écarts entre les attentes et la réalité vécue concernent l’atmosphère de travail, les relations avec la direction et les autres enseignants, et l’équilibre de vie.

C’est lié au fait que le débutant doit plus que les autres se mobiliser en dehors des heures de cours. Il doit préparer l’ensemble de ses cours pour la première fois. Et s’il réalise un intérim, il peut très bien avoir d’autres attributions au prochain intérim. Il peut cumuler les intérims. De plus, les débutants ont le sentiment qu’on leur confie les classes les plus difficiles à gérer. Enfin, ces charges de travail sont peu valorisées en termes d’images, d’horaire, de stress, de reconnaissance. Elles rendent l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle assez précaire.

Les répondants sont particulièrement sensibles à un manque d’implication et de soutien de la part de l’équipe de direction et des collègues et évoquent le sentiment d’être isolés, livrés à eux-mêmes alors même qu’ils ont besoin, au début de leur carrière, d’appui et de soutien.

L’étude débouche sur des recommandations ?
La plupart visent à réduire les obstacles extrinsèques qui rendent le quotidien de la fonction plus difficile. En voici quelques-unes.

Avant d’entrer dans la carrière, le débutant doit pouvoir identifier ses motivations, ses points faibles et ses limites. Et on doit l’aider à résorber son déficit d’information sur la réalité de la fonction. La formation pédagogique pourrait être plus pratique et renforcer les liens entre les stages et l’encadrement des conditions de travail. On peut aussi accentuer la transparence en matière de postes à pourvoir et de recrutement. Cela pourrait s’accompagner d’une plateforme dédiée aux offres d’emploi avec des canevas d’offres et de curriculum vitae. (NDLR : Depuis mai 2017, la nouvelle version de l’application Primoweb sur www.enseignement.be permet aux Pouvoirs organisateurs de publier une offre d’emploi pour un emploi déterminé et à la personne ayant manifesté sa disponibilité à un emploi dans l’enseignement de prendre connaissance des offres d’emploi publiées par les Pouvoirs organisateurs qui correspondent aux fonctions pour lesquelles elle s’est déclarée disponibles. Lire les circulaires 6171, 6265, 6409 sur http://www.adm.cfwb.be)

À son entrée, l’étude recommande de mettre en place un système de parrainage. La Fédération Wallonie-Bruxelles a réalisé un décret sur l’accueil des débutants encadrés par des référents.

Sur le plan organisationnel, on pourrait aussi optimiser la liste des manuels, logiciels et outils pédagogiques agréés, inciter les enseignants à définir, en début d’année scolaire, une note de planification de leur(s) cours.

Propos recueillis par
Patrick DELMÉE

(1) La trajectoire des enseignants en début de parcours, Fédération Wallonie-Bruxelles, décembre 2016. Version courte téléchargeable via http://www.enseignement.be/index.php?page=25703&ne_id=4966
Le rapport complet peut être obtenu sur demande via dominique.simon@cfwb.be .

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