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Magazine PROF n°2

 

Dossier Mythes et réalités de l’immersion

Cherche « native speakers » désespérément

Article publié le 01 / 06 / 2009.

Instituteurs, régents, traducteurs, ingénieurs, logopèdes,… L’immersion a multiplié les profils dans les salles de profs, chaque école ayant accommodé la recette selon ses convictions et … ses possibilités.

« Au printemps, je présente notre projet à l’École normale de Bruges avec mon équipe néerlandophone, explique Freddy Chartier, à la barre de l’École de Thy-le-Château. Pour ceux qui sont engagés, je me mue en agent touristique et immobilier. La commune paie le traitement de deux enseignants flamands et a aménagé des kots et une cuisine dans le presbytère ».

Les directions remuent ciel et terre pour trouver le « maitre-achat », le « native speaker ».
Les directions remuent ciel et terre pour trouver le « maitre-achat », le « native speaker ».
© PROF/FWB

Pas mince, le défi de trouver des candidats possédant des compétences linguistiques et pédagogiques ! Surtout si l’école ne côtoie pas les frontières, nationales ou linguistique. Le « maitre-achat » : les native speakers, apportant les savoir-faire linguistiques et la connaissance de la culture de la langue d’immersion. Pour les trouver, les directions frappent à la porte des écoles normales flamandes, du VDAB, de l’ORBEM, des écoles européennes, des universités Outre-Manche, de l’Institut Goethe, des ambassades,… Elles font jouer les contacts et le bouche à oreille ou placent des petites annonces. « Nous avons opté pour l’immersion à 50% jusqu’en 4e. Plus facile de jouer avec des mi-temps ! », explique Annie Bockstaele, qui pilote la section fondamentale de l’Athénée de Jodoigne.

Mais un projet d’immersion se fait-il sans dégâts pour les équipes en place ? « Chaque emploi en immersion est pris au détriment d’un monolingue », observe Jean- Pierre Vanroye, de la CGSP-Enseignement. « Dans une école désireuse de grandir (NDLR : ou de survivre) via l’immersion, les nouveaux venus ne mangent pas les emplois des enseignants, mais allègent sans doute une école proche, poursuit Marc Payen, secrétaire général adjoint de la CSC-Enseignement. Quand la population stagne, chaque création de classe entraine la suppression d’emplois de temporaires, voire la mise en disponibilité de personnel définitif (NDLR : qui n’a pas la possibilité de donner cours en immersion). Nous avions réclamé en vain la création préalable d’une structure de régulation pour évaluer l’impact de chaque projet. Et d’ici peu, nous lancerons une enquête sur la région de Bruxelles ».

Trouver les perles rares… et pouvoir les garder

Mais dans le fond, qu’est-ce qui pousse des enseignants néerlandophones à franchir la frontière linguistique pour percevoir un traitement moins élevé ? Sans pouvoir valoriser ces années passées dans des classes francophones s’ils (re)gagnent ensuite l’enseignement néerlandophone. L’envie de participer à une expérience nouvelle, d’apprendre le français ? L’écart entre les traitements se chiffre, à ancienneté identique, à une petite centaine d’euros tant pour les instituteurs et régents que pour les licenciés. « Mais le décret ayant créé une fonction spécifique d’enseignant en immersion, un jeune néerlandophone peut ainsi décrocher un emploi à temps plein, stable et une nomination plus rapide », précise Wim De Grieve, inspecteur de langues dans le fondamental.

Ces perles rares trouvées, il faut les garder et les remplacer le cas échéant. « Ces enseignants considèrent souvent ce poste comme une expérience utile et forment une population mouvante sur laquelle on ne peut pas s’appuyer à long terme », souligne Robert Briquet, ancien directeur de l’Athénée Léonie de Waha, à Liège. « Pendant leur absence, c’est la débrouille ; il nous est arrivé de suspendre le projet pour quelques semaines ou de réduire le nombre de périodes en néerlandais », explique Véronique Noiret, directrice de l’École fondamentale de Fays-Paliseul.

Confrontée à ce nomadisme, l’École primaire Saint-Joseph, à Namur, a abandonné l’immersion pour passer à l’apprentissage précoce du néerlandais (deux heures par semaine). Faute de recrues, l’École du Centre, à Montigny-le-Tilleul, a interrompu le projet en janvier. À Sars-la-Bruyère (Frameries), il n’a jamais vu le jour : « Nous devions engager une institutrice pour la 3e maternelle, prévoir son remplacement éventuel et engager aussi celle de 1re primaire », explique Ghislain Stiévenart, échevin de l’Enseignement. Face à ces difficultés prévisibles, par manque de locaux, par crainte de la perte d’emplois ou que l’immersion soit un effet de mode, les directions d’écoles secondaires libres namuroises refusent de lancer le projet, pourtant poussées dans le dos par des parents d’enfants « immergés » dans le primaire.

Ces difficultés freinent-elles l’éclosion des projets ? À ce jour, l’Administration estime qu’une quinzaine de nouveaux projets verront le jour en septembre. Encore faudra-til trouver les enseignants…

Amener les élèves à bon port

Les native speakers ne sont pas seuls à pouvoir enseigner en immersion. À l’exception des régents, licenciés en langues germaniques, traducteurs et interprètes, les diplômés francophones doivent réussir l’examen de connaissance approfondie de la langue de l’immersion. En 2007, vingt candidats ont passé la barre en néerlandais, quarante-sept en anglais et un en allemand. En 2008, le jury a attribué treize « laissez-passer » en néerlandais et quinze en anglais.

Au total, l’immersion réunit dans les écoles des personnes d’horizons divers, aux statuts et barèmes variés. Car le navire lancé, il faut amener les élèves à bon port. « On recrute parfois du personnel n’ayant ni titre requis, ni même titre suffisant. Avec le risque de dégâts sur le plan pédagogique », résume Marc Payen. Wim De Grieve nuance : « Les titres ne sont pas tout ; les compétences, c’est d’abord une affaire de personnes. Et engager un native speaker ne garantit pas un très bon niveau linguistique ».

 

Entrer en immersion

Pour entrer en immersion, il y a d’une part les capacités linguistiques, d’autre part les aptitudes pédagogiques, qui s’entremêlent.

Pour un « native speaker », il faut posséder, selon le niveau, le titre requis (diplôme d’instituteur maternel, primaire, agrégé de l’enseignement secondaire) délivré dans la langue de l’immersion, ou un titre étranger équivalent. Il faut aussi faire la preuve d’une connaissance fonctionnelle du français, lors d’un examen organisé par la Communauté française.

Pour un diplômé francophone, la voie est libre s’il a un certificat d’études secondaires supérieures dans la langue de l’immersion. Si ce n’est pas le cas, il doit réussir un examen donnant droit à un certificat de connaissance approfondie de la langue d’immersion néerlandaise, anglaise ou allemande, lors d’un examen organisé par la Communauté française.

Dans l’enseignement subventionné, certains enseignent avec un titre suffisant A (un diplôme de régent pour un poste d’instituteur primaire, par exemple) ou, moyennant dérogation, un titre suffisant B (une puéricultrice pour un poste d’institutrice maternelle,…), ou encore aucun titre repris dans la règlementation (moyennant avis préalable, puis dérogation accordée par l’autorité ministérielle sur avis de la commission des titres B). Dans l’enseignement organisé par la Communauté française, on ne parle pas de titres suffisants, mais d’« article 20 ».

Des formations spécifiques pour les futurs enseignants

Les filières pédagogiques ne proposent pas de formation spécifique à l’enseignement en immersion. Pourtant, un cours de sciences ou d’histoire donné dans une autre langue, loin d’être une simple traduction, nécessite une pédagogie spécifique. « Indispensable d’agir au niveau de la formation initiale », note Mary Chopey. Et cette spécialiste de l’immersion à la Fédération de l’enseignement secondaire catholique (FESeC) de pointer des initiatives en Allemagne, en Autriche, ou en Grande-Bretagne… « À l’université de Nottingham, les futurs enseignants en géographie, sciences, histoire, math,… peuvent ajouter à leur formation initiale un module où ils apprennent à enseigner leur discipline dans une autre langue. Dans cette optique, ils cherchent à renforcer leurs aptitudes linguistiques ».

Chez nous, des projets fleurissent. La Communauté française propose à de futurs instituteurs primaires trente bourses pour effectuer des stages de quatre semaines dans des écoles primaires anglaises. Un accord devrait être signé en mai entre les ministres de l’Enseignement des trois Communautés pour améliorer les compétences linguistiques des enseignants du primaire, du secondaire inférieur et des régents en langues.

En particulier pour les accords entre communautés française et flamande, les hautes écoles seront chargées d’organiser deux fois par an des formations continuées d’une semaine pour des enseignants néerlandophones. Des accords de collaboration entre des hautes écoles francophones et flamandes permettront la formation commune de régents néerlandophones en français et de régents en langues germaniques francophones. Et, au terme de cette formation, les étudiants pourront recevoir deux diplômes (des Communautés française et flamande). Enfin, les seize hautes écoles organisant le régendat en langues recevront des subventions pour envoyer leurs étudiants de dernière année en stage dans l’autre Communauté, pour un minimum de quatre semaines.

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