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Magazine PROF n°43

 

Coté psy 

Apprendre à (bien) aimer

Article publié le 02 / 09 / 2019.

La violence dans les relations amoureuses des jeunes a été longtemps ignorée. C’est pourtant une réalité qui interpelle et face à laquelle l’école peut apporter des réponses réelles.

Depuis 2012, le décret Missions prévoit que l’Éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle (ÉVRAS) est obligatoire dans l’enseignement fondamental et secondaire (1).

La Pre Fabienne Glowacz est directrice de l’unité de recherches ARCH et du Service de psychologie clinique de la délinquance, à l’ULiège. Pour cette spécialiste des violences des jeunes dans leurs relations amoureuses, la prévention de ces dernières doit passer aussi par le développement d’une approche globale dans les écoles.

© PROF/FWB

PROF : Vous finalisez une étude pour la Fédération Wallonie-Bruxelles sur les violences dans relations amoureuses chez les jeunes. De premières conclusions ?
Fabienne Glowacz :
Tout d’abord, il est important de relever que si les politiques publiques et de prévention se sont développées ces dernières années au niveau des violences conjugales des adultes, la violence dans les relations amoureuses des jeunes est encore méconnue et banalisée. On l’envisage depuis peu comme un sujet de recherche et une problématique à prendre en compte avec des enjeux majeurs.

En effet, la période de la préadolescence et de l’adolescence est fondamentale dans le développement de la personne. La relation aux autres et la relation amoureuse y comptent énormément et participent à la construction de soi.

Selon les études sur la question, les jeunes ne sont pas très équipés pour aborder la relation amoureuse, pour savoir ce qui est acceptable ou pas, ce qui est normal, ce qui est de l’ordre de la preuve d’amour et ce qui est plutôt de la violence.

Nos recherches montrent que les adolescents, filles et garçons, sont confrontés à différentes formes de violences dans leurs relations amoureuses, les filles étant davantage victimes de violences sexuelles. En nous intéressant également aux attitudes et représentations que les jeunes ont de ces violences, nous constatons que plus ils tolèrent ces violences, plus ils risquent de les vivre, en tant qu’auteur ou victime.

De plus, les jeunes étant soit victimes soit auteurs d’une forme de violence risquent eux-mêmes d’être auteurs et/ou victimes d’une autre forme. Donc, on ne doit banaliser aucune forme de violence qu’elle soit verbale, psychologique ou physique.

Où les jeunes se situent-ils, en matière d’acceptabilité, de tolérance de la violence ?
Bien que les jeunes se montrent peu enclins à normaliser les comportements violents dans les relations amoureuses, les garçons acceptent davantage les violences physiques, psychologiques et sexuelles pouvant prendre place dans les relations amoureuses. Mais les filles sont aussi agissantes, plus violentes que ce que les représentations sociales ou collectives laissent supposer. Au niveau des violences psychologiques, notamment.

Web série, affiches, chat de demande d’aide, ressources pour les jeunes et pour les enseignants… Voilà ce que propose arrete.be, le site d’une campagne développée par la Fédération Wallonie-Bruxelles, en collaboration avec la Wallonie et la Cocof.
Web série, affiches, chat de demande d’aide, ressources pour les jeunes et pour les enseignants… Voilà ce que propose arrete.be, le site d’une campagne développée par la Fédération Wallonie-Bruxelles, en collaboration avec la Wallonie et la Cocof.

Comment peut-on « équiper » les jeunes et prévenir ces violences ?
L’école est un lieu prioritaire. On y touche les jeunes de toutes les classes sociales et de tous les vécus, dans un cadre qui favorise le fait d’être à l’écoute. L’intervention de spécialistes de la prévention, pour l’ÉVRAS notamment, le soutien de services en ligne ou le développement de prévention par les pairs sont très importants mais ils doivent s’intégrer dans une approche plus globale qui implique l’ensemble d’un établissement.

Je prône des préventions précoces – dès le primaire où s’introduit le sexisme ordinaire – et avec ce que j’appelle des préventions « positives », qui mettent en avant des valeurs d’ailleurs très importantes pour les adolescents, comme le respect, l’égalité, la responsabilité, la communication... Il ne s’agit pas seulement de dire « attention ! » : les jeunes ont besoin de valeurs et de comprendre ce que leurs déclinaisons peuvent signifier au niveau du couple.

Ce qui ressort également de nos recherches, c’est que ces violences qu’on a tendance à banaliser ont un impact sur le bien-être des adolescents, avec des indicateurs de dépressivité. Il y a un réel impact sur la santé physique et psychologique et le bien-être qui diminue la disponibilité cognitive des jeunes.

Propos recueillis par
Monica GLINEUR

(1) http://enseignement.be/index.php?page=27276&navi=4047&rank_page=27276

Un processus au long cours à engager très tôt

« Ce n’est pas une animation one shot, débarquant entre gym et maths, qui va être de l’ÉVRAS », lance Sabine Catoul. Psychologue et psychothérapeute, Mme Catoul travaille dans un Centre de planning familial (1) depuis vingt ans, et fait part de son expérience.

En 20 ans, le rapport à l'autre a énormément changé.
En 20 ans, le rapport à l'autre a énormément changé.
© PROF/FWB

Le Collectif Contraception - Santé des femmes, à Etterbeek, entretient des collaborations de long terme avec des écoles, primaires et secondaires, situées dans la commune, pour mener leur projet ÉVRAS.

« Nous avons une connaissance des quartiers et de la population de la commune. » Le Centre réfléchit avec les écoles à la manière de développer un projet susceptible d’accompagner le jeune tout au long de sa scolarité. Mais aussi à la façon d’organiser des espaces « où les jeunes savent qu’ils peuvent déposer ».

Le Centre accompagne la création de « cellules ÉVRAS ». Un moyen pour les écoles de développer une action coordonnée et pérenne : « Ces cellules sont souvent portées par plusieurs professeurs et par les éducateurs, avec l’appui du CPMS. Mais l’implication de la direction est indispensable pour créer une réelle dynamique avec les élèves », souligne Mme Catoul.

« Certaines écoles ont prévu des locaux avec plein de couleurs, où les élèves viennent parce qu’ils savent qu’il y a la permanence d’une personne de confiance une fois par semaine. D’autres ont prévu des badges permettant d’identifier ceux qui, parmi l’équipe pédagogique, sont des personnes de référence. »

À quelles grandes évolutions a-t-elle assisté en vingt ans ? « Le rapport à l’autre a changé, ce qui résulte d’une vraie révolution dans notre manière de vivre, principalement par notre rapport au téléphone. Là, il faut être très attentif car les rencontres et les rapports à l’autre qui s’y véhiculent cristallisent des violences. Ce ne sont pas de nouvelles violences, ce sont des violences autrement. »

C’est aussi pour ça qu’il est important d’intervenir dès le primaire « car les choses vont beaucoup plus vite ». Et qu’il n’est jamais trop tôt pour apprendre comment gérer les relations à l’autre et à soi-même.

M. G.

(1) Les missions des Centres de planning familial sont encadrées par des décrets de la Région wallonne et de la Cocof. Ils proposent des animations ÉVRAS sur différentes thématiques. http://www.loveattitude.be

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