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Magazine PROF n°6

 

Souvenirs d'école 

Face à face avec Benoît Lengelé

Article publié le 01 / 06 / 2010.

Professeur de médecine à l’UCL et à Harvard, Benoît Lengelé a participé à la première greffe de visage, en 2006. Il nous parle de son parcours et de ses passions.

PROF : Votre premier souvenir d’école ?
Benoît Lengelé : Je n’ai que des souvenirs heureux. Je garde la nostalgie de mon école maternelle, le Sacré-Cœur à Waterloo. Elle était dirigée par des bonnes sœurs aimantes et bienveillantes. Je sens encore le délicieux parfum de la cire. Après, je suis allé à Cardinal Mercier, un grand collège ouvert avec beaucoup de verdure et de liberté. De merveilleux souvenirs...

Tout fut donc pour le meilleur…?
J’ai connu des difficultés. Au début de mes études secondaires, je me suis retrouvé dans une classe expérimentale. Il y avait l’image de Che Guevara sur le mur, mais plus de structure. Je me suis amusé mais, en un an, j’ai accumulé un retard colossal. Cette expérience hippie est devenue un cauchemar. Elle m’a obligé à me battre pour récupérer mon niveau. À l’époque, j’étais souvent malade. J’en ai profité pour lire les grands auteurs dans le texte : Hugo, Chateaubriand, Montesquieu, Voltaire…

Benoît Lengelé:
Benoît Lengelé: "Je garde la nostalgie de mon école maternelle".
© S. Vanderstichele

Y a-t-il des professeurs qui vous ont marqué ?
Nos professeurs nous ont éduqués avec beaucoup d’amour et de bienveillance, en nous inculquant des valeurs de base : l’honnêteté, l’humilité… Beaucoup d’entre eux m’ont influencé. Le professeur de sciences nous a remarquablement préparés, mais l’élément déclencheur de ma future carrière fut le prof de… gym ! J’étais mauvais en gym, mais loin de m’enfoncer, il m’a toujours aidé à me dépasser. À une épreuve où j’avais fait un bon résultat, il m’a dit avec beaucoup d’empathie : « Toi, tu seras médecin parce que tu sais ce que la souffrance veut dire ».

Quel regard portez-vous sur notre enseignement de la médecine ?
En Belgique, notre niveau est excellent ! Mais avec le passage à six ans, il va falloir raboter. Cela va déforcer la qualité de notre enseignement.

Vous avez reçu des prix honorifiques. Que représentent-ils pour vous ?
Cela fait plaisir parce qu’on est plutôt dans une culture du bâton que de la reconnaissance. Ces récompenses, je les accepte avec devoir et humilité : « noblesse oblige ! » Cela m’aide à honorer ma devise, « fais face ! » : affronter la difficulté, créer des choses nouvelles…

Vous êtes passionné de littérature et de peinture, les portraits notamment…
La présence des livres m’est indispensable à vivre. Je pioche dans tout : littérature, biographies historiques, anthropologie et philosophie… J’ai toujours aimé l’histoire, surtout de la Renaissance aux Lumières, cette période humaniste où l’individu est au centre de la réflexion. Le visage dans les portraits de cette période atteint sa densité humaine.

Vous dessinez vous-même beaucoup.
Je dessine toujours au tableau à la craie. Je tiens beaucoup à l’éphémère beauté de l’instant. Il y a d’abord l’émotion quand on part de rien. Et puis, en reconstruisant une image dynamique, l’étudiant l’interprète mieux dans sa complexité.

La greffe du visage qui vous a rendu célèbre interpelle. Comment vivre avec le visage d’un autre ?
Faire un puzzle avec des morceaux prélevés est un mauvais concept. Quand on met un cerveau de caille dans un poulet, le poulet tire une tête de caille ! Le visage greffé, ce n’est que de la matière. Quand on fait une greffe, le cerveau envahit les nouvelles structures. Au début, la patiente disait « le » visage, « le » nez. Petit à petit, elle est arrivée à dire « mon » visage, « mon » nez. Elle ressemble plus à elle-même avant l’accident qu’à celle dont on a prélevé le visage. Un jour, on s’est embrassés, mais qui ai-je embrassé ? Moi, je ne me pose même plus la question : c’est elle tout entière. Elle, dit : « J’ai ma petite sœur qui m’accompagne »…

Propos recueillis par
Étienne GENETTE

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