Magazine PROF n°55
Dossier Rentrée 2022
Que font les inspecteurs dans les écoles ?
Article publié le 30 / 08 / 2022.
Avec les changements dans le pilotage de l’enseignement, les inspecteurs restent présents dans les écoles. Mais pour quels rôles ? Précisions.
Pour Pascale Genot, Inspectrice générale coordonnatrice, la réforme de 2019 du Service général de l’Inspection (SGI) consécutive au Pacte pour un Enseignement d’Excellence s’inscrivait « dans un cheminement ». Retour sur celui-ci et point sur la situation actuelle.
PROF : La précédente réforme de l’Inspection datait de 2007. Dans quel contexte ?
Pascale Genot : Aux environs des années ’90, il y a eu une prise de conscience du caractère très inégalitaire de notre enseignement. Une forme de consensus s’est dégagée au sein des acteurs de l’enseignement pour réduire ces inégalités notamment en établissant des socles de compétences et des référentiels communs à toutes les écoles et tous les enseignants.
Un pilotage interréseaux de l’enseignement est apparu, avec la création d’une Commission de Pilotage, l’élaboration d’indicateurs chiffrés, la mise en place d’épreuves certificatives…
À l’époque, l’Inspection a connu une première grande réforme s’inscrivant dans ce mouvement.
En 2007 a ainsi été créé un Service général de l’Inspection (SGI) regroupant l’inspection de l’enseignement organisé et l’inspection de l’enseignement subventionné. Les missions du SGI ont été recentrées sur les aspects pédagogiques, en particulier sur le respect des référentiels, des programmes et des principes pédagogiques découlant du décret Missions. À partir de 2007, les missions de l’Inspection ont surtout porté sur le contrôle du niveau des études dans les différentes disciplines et sur l’évaluation de dispositifs pédagogiques ; elles ont été moins centrées sur le contrôle des pratiques des enseignants. Dans le même temps, des cellules de conseils et de soutien pédagogiques ont été créées au sein des différents réseaux.
Le Pacte a amplifié cette volonté d’encadrement du système éducatif associant les acteurs, mais en impliquant aussi les écoles directement ?
Oui, dans le cadre de la réforme de 2007, les inspecteurs effectuaient systématiquement tous les trois ans, dans chaque école, un contrôle du respect des balises fixées par le pouvoir régulateur.
Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Le nouveau modèle de pilotage repose sur un principe d’autonomie et de responsabilisation des établissements. Il est peu compatible avec un contrôle systématique du niveau des études. Des objectifs s’amélioration du système éducatif (OASE) sont fixés pour l’ensemble de l’enseignement obligatoire de la FW-B. À charge des écoles de se fixer leurs objectifs spécifiques, en cohérence avec les OASE, en fonction de leurs réalités et de leur diagnostic, et d’établir les stratégies pour les atteindre. Les PO, par l’intermédiaire des conseillers au soutien et à l’accompagnement (CSA), soutiennent les écoles dans la préparation et la mise en œuvre de leur contrat d’objectifs (CO) tandis que les directeurs de zone (DZ) et les délégués au contrat d’objectifs (DCO), qui sont les représentants du pouvoir régulateur, contractualisent et vérifient l’atteinte des objectifs.
Les inspectrices et les inspecteurs restent aussi des représentants du pouvoir régulateur dans les écoles. Pour quels rôles ?
C’est ce qui est peut-être encore compliqué à comprendre parce qu’ils sont de différents ordres : missions d’audit, d’évaluation des dispositifs pédagogiques, et d’investigation et de contrôle, principalement.
Ce qui est également nouveau, c’est que pour chacune de ses missions, l’Inspection reçoit un mandat qui définit les limites et la portée de son intervention. Les missions sont ainsi mieux balisées et mieux articulées au pilotage des écoles.
On pourrait tenter de clarifier le travail de l’Inspection par la question que se pose l’inspecteur lorsqu’il intervient dans une école. Cette question diffère selon le type de mission qu’il est amené à exercer.
Commençons par l’audit, une mission qui a été créée dans le cadre de la contractualisation des écoles avec le pouvoir régulateur. Elle peut intervenir dans deux cas.
Premier cas : l’audit réalisé auprès d’écoles en dispositif d’ajustement (EDA), c’est-à-dire qui enregistrent des performances en-dessous des écoles de même catégorie et de même profil. L’inspecteur apporte un regard extérieur pour dégager les points faibles que l’école doit améliorer et les points forts sur lesquels elle peut s’appuyer pour atteindre de meilleurs résultats.
Deuxième cas : l’audit mené à la demande des DZ/DCO lorsque, pour des raisons d’ordre divers, l’école ne parvient pas à contractualiser avec le pouvoir régulateur, ou suite à une évaluation intermédiaire ou finale du CO.
La question que se pose alors l’inspecteur est : « Quels sont les processus mis en œuvre par l’école qui dysfonctionnent à un point tel que celle-ci a été identifiée en EDA ; ne parvient pas à conclure un CO ou à rencontrer ses objectifs ? ».
Et pour les deux autres missions principales ?
Elles existaient déjà auparavant, sous d’autres formes. Il s’agit de la mission d’évaluation de dispositifs pédagogiques/éducatifs et de la mission d’investigation et de contrôle spécifique.
Dans le cadre d’une mission d’évaluation, les inspecteurs se rendent dans des écoles, sélectionnées sur échantillonnage, pour collecter des informations. Le but est d’informer le Gouvernement sur la manière dont les dispositifs pédagogiques/éducatifs sont mis en œuvre au regard du prescrit règlementaire. Parfois en collaboration avec les universités d’ailleurs, apportant leur regard de pédagogues et de praticiens.
La question que se pose alors l’inspecteur est : « Comment le dispositif adopté par le législateur est-il mis concrètement en
œuvre ? Quels obstacles, quelles conditions nécessaires et quelles bonnes pratiques peuvent être observées ? ».
Enfin, dans le cadre de l’investigation et du contrôle, la mission des inspecteurs s’apparente plus à une enquête menée à la suite d’une plainte ou d’un manquement substantiel détecté à l’occasion d’une autre mission. Dans ce cas, le rapport s’adresse à l’école et à la Direction générale de l’Enseignement obligatoire.
La question que se pose alors l’inspecteur est : « Les faits dénoncés sont-ils avérés ? Quel est le degré de gravité ? Comment peut-on les expliquer ? Quelle suite donner à ce constat ? »
Et l’Inspection a à remplir bon nombre d’autres missions…
Oui, dont l’importante mission d’expertise pour les évaluations non certificatives et certificatives. Pour ces dernières, des équipes d’inspecteurs travaillent à l’élaboration des épreuves durant toute l’année, mais la grosse mobilisation a lieu en mai et en juin. À cette époque de l’année, ce sont tous les membres du SGI, accompagnés des DCO/DZ, qui y sont occupés à temps plein.
Là aussi, habités par une question : « Comment élaborer et organiser les épreuves pour qu’elles soient pertinentes et justes ? »
Propos recueillis par Monica GLINEUR
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