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Magazine PROF n°31

 

Dossier Rentrée 2016

Éducation à la philosophie et à la citoyenneté.
En primaire dès octobre, en secondaire en 2017

Article publié le 01 / 09 / 2016.

Le cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté fait son apparition en primaire dans l’enseignement officiel et libre non confessionnel.

Dès ce 1er octobre 2016, l’éducation à la philosophie et à la citoyenneté fait l’objet d’un cours spécifique dans les écoles primaires des réseaux officiels (Wallonie-Bruxelles Enseignement, enseignement communal et provincial) et du réseau libre non confessionnel qui offrent le choix entre les cours philosophiques (1).

© Fotolia/Rawpixel.com

En 2017 dans le secondaire

Ce nouveau cours sera introduit au secondaire à la rentrée 2017. Comme en 2015-2016, l’encadrement pédagogique alternatif peut donc y être organisé en 2016-2017.

Une ou deux périodes

L’arrivée de ce nouveau cours ne modifie pas le nombre de périodes dans la grille-horaire des écoliers. Chaque année, en septembre, les parents préciseront leur choix pour leur enfant : il suivra soit une heure de religion/morale et une heure d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté, soit deux heures du nouveau cours. L’encadrement pédagogique alternatif disparait donc du primaire  (2).

À partir de quand ?

Le nouveau cours sera organisé à partir du 1er octobre, ce qui permettra de calculer les périodes nécessaires, en fonction des choix des parents.

Formation au référentiel

Un référentiel précise les compétences à développer dans l’enseignement fondamental. Pour aider les enseignants à se l’approprier, l’Institut de la Formation en cours de Carrière organisera une journée d’introduction (http://www.ifc.cfwb.be - code 201501501), puis, à partir d’octobre, une formation complémentaire de trois jours (code 201501602).

Programme commun

Les réseaux d’enseignement officiel et libre non confessionnel ont élaboré un programme commun (3). Il s’agit surtout d’amener les élèves à réfléchir, à prendre la parole, à débattre de sujets de société. Ce programme est provisoire. Des modifications pourront y être proposées, avec la collaboration et l’expertise des acteurs de terrain.

Ce cours sera-t-il inspecté ?

Ce cours ne sera pas inspecté jusqu’en 2020. Mais un groupe de six inspecteurs, mandatés comme experts, accompagnera sa mise en place, récoltera les bonnes pratiques, soutiendra les enseignants avant la désignation potentielle de conseillers pédagogiques spécifiques. Ils prépareront des pistes pour baliser l’inspection proprement dite. Et assureront aussi un feed-back régulier avec le cabinet de l’Éducation (4).

Qui l’enseignera ?

Ce nouveau cours sera donné par des maitres de philosophie et citoyenneté engagés sur base volontaire. Les professeurs de religion/morale sont prioritaires et parmi eux joue la priorisation : nommés/définitifs, temporaires prioritaires et temporaires. Ils doivent avoir au moins un diplôme de bachelier reconnu en Belgique et être formés à la neutralité via la formation initiale ou en ayant réussi avant le 1er octobre 2016 l’unité d’enseignement « formation à la neutralité » organisée en promotion sociale. Les enseignants diplômés de l’enseignement officiel au plus tard en 2003-2004 sont considérés comme formés à la neutralité.

Au 1er septembre 2020, ceux qui n’étaient pas nommés définitivement au 30 juin 2016 devront avoir un titre pédagogique mais aussi un certificat en didactique de la philosophie et de la citoyenneté délivré par les opérateurs de la formation initiale.

Ajoutons qu’un enseignant ne pourra pas donner un cours de religion/ morale et un cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté dans une même implantation. Des dérogations sont possibles à certaines conditions matérielles (par exemple s’il enseigne dans plusieurs implantations distantes entre elles…). Tous les détails à ce sujet figurent dans la circulaire 5821 (5).

Des pertes d’emploi ?

Les enseignants de cours philosophiques dans l’officiel sont censés perdre une demi-charge. Mais le Gouvernement souhaite conserver l’emploi des nommés à titre définitif et des temporaires prioritaires. Ainsi, il attribue un volume de périodes plus important que l’an passé pour permettre d’organiser à la fois les cours de religion/morale et le nouveau cours.

Les professeurs de religion et morale qui refusent de donner le nouveau cours seront soumis au mécanisme de réaffectation dans leur fonction.

Et dans le libre ?

Dans le réseau libre catholique, les deux heures de religion sont maintenues. L’éducation à la philosophie et à la citoyenneté s’insère dans les disciplines existantes. Dans le libre non confessionnel qui n’offre pas le choix des cours philosophiques, les heures de morale sont maintenues et le nouveau cours s’insère dans les disciplines existantes.

Patrick DELMÉE et Catherine MOREAU

 

(1) Le site enseignement.be accueille une page « Cours de philosophie et de citoyenneté ». On y trouve notamment un Guide pratique pour les enseignant-e-s. http://bit.ly/2bM3sKP
(2) http://www.gallilex.cfwb.be/fr/leg_res_01.php?ncda=42840&referant=l01
(3) http://bit.ly/2bf4VuY, http://www.wallonie-bruxelles-enseignement.be, http://bit.ly/2bf4VuY
(4) Le Cabinet de la ministre de l’Éducation dispose d’une adresse de contact pour le nouveau cours : cpc@gov.cfwb.be
(5) Circulaire n° 5821 Création de la fonction de maître de philosophie et citoyenneté. http://www.adm.cfwb.be

 

De 1991 à 2016

1991.
Une commission mise sur pied par le ministre de l’Éducation examine la possibilité d’introduire un cours de philosophie pour tous les élèves en fin du secondaire.

1995.
Une enquête de l’Unesco, clôturée par la Déclaration de Paris, recommande de généraliser l’enseignement de la philosophie.

2000.
Hervé Hasquin, ministre-président du Gouvernement de la Communauté française, propose de remplacer les cours de religion et de morale non confessionnelle par un cours de philosophie et d’histoire comparée des religions, aux deux dernières années du secondaire, dans l’enseignement officiel.

2009.
Quatre parlementaires déposent une proposition de décret pour un cours de philosophie et d’histoire culturelle des religions au 3e degré du secondaire. Le Conseil consultatif des cours philosophiques, créé en 2005, a un avis négatif et propose un questionnement philosophique tout au long de la scolarité obligatoire.

2012.
La ministre de l’Enseignement propose un tronc commun à tous les cours philosophiques, tous réseaux confondus. En réaction, le Centre d’étude et de défense de l’école publique prône, pour tous les élèves, une formation citoyenne combinant approche philosophique et connaissance historique des religions et des mouvements de pensée non confessionnelle.

2014.
Dans sa Déclaration de politique communautaire, le Gouvernement annonce « dans l’enseignement officiel, progressivement à partir de la 1re primaire, un cours commun d’éducation à la citoyenneté […] en lieu et place d’une heure de cours confessionnel ou de morale laïque ».

12/03/ 2015.
La Cour Constitutionnelle confirme le droit pour un parent d’obtenir pour son enfant, sur simple demande, une dispense de cours philosophique, y compris de morale laïque. Elle répond ainsi à une question posée par le Conseil d’État à la suite du refus exprimé par la Ville de Bruxelles en octobre 2013, de dispenser une élève de suivre un cours philosophique.

14/07/2015.
Un décret instaure un mécanisme de dispense pour les cours de religion et de morale non confessionnelle dans l'enseignement officiel. Cela implique la mise en place à la rentrée 2015 d’un cours d’encadrement pédagogique alternatif, pour les élèves dispensés de cours philosophiques.

13/07/2016.
Le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles vote un décret relatif à la mise en œuvre d’un cours de philosophie et de citoyenneté dans l’enseignement fondamental.

Ce nouveau cours exige neutralité et esprit critique

Professeure de morale, Macha Saintenois s’est préparée à donner le nouveau cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté. Rencontre.

Macha Saintenois enseigne la morale dans les sections fondamentales des Athénées de Woluwe-Saint-Pierre et de Jodoigne. Cette année, elle continuera à le faire, et est volontaire pour donner le nouveau cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté.

PROF : Vous devrez suivre une formation à la neutralité. Qu’en attendez-vous ?
Macha Saintenois :
Le respect de la neutralité et l'exercice de l'esprit critique me semblent essentiels pour assurer ce futur cours. Les cours de morale et religion sont assurés par des professeurs aux parcours très divers : absence de diplômes pédagogiques pour certains, licences universitaires pour d'autres, diplômes d’instituteurs,... Une formation commune parait un bon point de départ.

De cette formation, j’attends plutôt des idées de projets ou d'activités en classe en respect avec le principe de neutralité. Mais ce n’est qu’un début à compléter par d’autres ressources sur la philosophie, le débat citoyen, la défense des valeurs citoyennes. L’examen approfondi du nouveau programme et la bibliographie très complète qui l’accompagne aideront les professeurs désarmés. De plus, l’offre de formation est très diverse.

Certains enseignants, surtout les professeurs de morale, sont plus familiarisés avec les exigences de ce nouveau cours. Son programme montre de grandes similitudes avec celui du cours de morale. Ma pratique pédagogique part de l'observation des faits par les élèves, pour qu'ils en retirent eux-mêmes l'analyse critique et la défense des valeurs humanistes (dignité de l'être humain, solidarité, encouragement aux progrès, tolérance). Ainsi je pense déjà respecter le principe de neutralité.

Comment vous préparez-vous?
J’ai commencé la formation à la neutralité fin aout. Et, dès l’an passé, j’ai consulté le programme en ligne et j’ai suivi des formations à la philosophie pour les enfants : cela m’a permis d'élaborer (avec la collaboration d'une bibliothécaire bruxelloise) des activités qui entrent parfaitement dans le cadre du nouveau cours, et de les tester en classe. Cela a bien fonctionné.

Autour des aventures d’un petit héros nommé Toutik, j’ai créé pour les 7-11 ans une série de récits illustrés avec activités et jeux philosophiques. Ils abordent des problématiques humaines et citoyennes par le biais de personnages et animaux de l'Égypte antique – très appréciée par les enfants. J’y aborde différents thèmes : lien social et amitié, compétition et solidarité, accueil des réfugiés, de la paix à la guerre, gestion de conflits, dérives alimentaires, marquage psychologique du voleur…

Certains parents pourront s’étonner de votre double casquette…
Peu je crois. Ils réaliseront vite la similitude des programmes. S’ils voient une différence entre le nouveau cours et la morale, ce sera plutôt au niveau de sa démarche très axée sur le débat citoyen et au niveau du regroupement des élèves.

Comment les enseignants de votre entourage voient-ils ce cours?
Certains collègues font le choix de ne pas postuler pour le nouveau cours par conviction. D’autres reculent devant la tâche et l’inconnu. Cela relève évidemment de leur liberté. Mais, d'une façon générale, je constate de l'intérêt teinté de crainte. Il serait rassurant de connaitre le plus vite possible les conditions d’organisation : horaires, implantations, groupes envisagés (nombre d'élèves par groupes, regroupements des âges,...).

Ce cours sera sans doute difficile à organiser…
Les directions vont devoir aménager les horaires. Les heures de morale et religion vont être réduites. Lesquels des professeurs de ces cours assureront la citoyenneté ? Les professeurs qui auront perdu des heures devront aller dans des écoles supplémentaires pour compléter leur horaire ou être réaffectés. Trajets supplémentaires, équipes pédagogiques multiples,… tout ceci va demander aux enseignants beaucoup de souplesse…

Que penser des regroupements verticaux d’élèves ?
La verticalité ne devrait pas poser trop de problèmes tant qu'on ne mélange pas plusieurs cycles. Il faudra veiller à ne pas constituer des groupes trop nombreux. Au-delà de 20 élèves, le débat démocratique et citoyen devient un exercice fort compliqué et perd de son efficacité… Que le bon sens l’emporte.

Propos recueillis par
Patrick DELMÉE

Des projets citoyenneté

Si certains enseignants chargés du cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté sont aussi branchés par la pédagogie du projet, ils ne manqueront pas l’appel à projets initié par le Conseil supérieur d’éducation aux médias.

En effet, cette année, celui-ci invite tous les établissements scolaires de la Fédération Wallonie-Bruxelles à réaliser un projet sur le thème Médias et citoyenneté : s'informer, se mobiliser et communiquer.

Les projets, qui devront aboutir à une production médiatique diffusée ou partagée, sont à rentrer jusqu'au 30 septembre (formulaire électronique en ligne via le site du CSEM). Ceux qui seront retenus pourront être réalisés avec l’aide d’un subside pouvant aller jusqu’à 2 000 €.

Infos: http://csem.be/appelaprojet

Un vrai casse-tête !

« À titre personnel, je trouve que le cours de philosophie et citoyenneté est une idée bénéfique, avec un contenu enthousiasmant, explique Marcel Buelens, directeur du service Enseignement de la Ville d’Ottignies-Louvain-la-Neuve. M. Buelens a participé à la création du référentiel, en tant que représentant du Conseil de l’Enseignement des Communes et Provinces. Selon lui, « on a sacrifié l’ambition au maintien de l’emploi. C’est un choix particulièrement contraignant ! »

En 2015-2016, les neuf écoles primaires communales ont confié à vingt-et-un maitres spéciaux 138 périodes hebdomadaires de cours philosophiques : morale (38), religion catholique (38), islamique (36), protestante (22) et orthodoxe (4). Quant à l’encadrement pédagogique alternatif, il a représenté 36 heures d’encadrement par les titulaires de classe ou par des animateurs extérieurs formés à des ateliers de recherche philosophique.

« Dès la rentrée, nous allons demander aux parents de choisir : cours philosophique ou seconde heure de philo/citoyenneté, explique M. Buelens. Puis, il faudra faire les décomptes. Qui perdra des périodes de cours ? »

Pour le nouveau cours, les enseignants des cours philosophiques, volontaires et en perte de charge, sont prioritaires. « Plusieurs ont montré de l’intérêt, ont fait quelques formations. Par choix ou pour préserver leur emploi ? Ces enseignants qui découvrent le programme du cours devront souvent se rendre dans quatre, cinq, six écoles. Habitués à des petits groupes, voire à quelques élèves, certains se retrouveront devant des classes de 24 ! Construire les horaires va être un casse-tête ! »

« Comment gèrerons-nous les réactions des élèves qui verront un enseignant de cours philosophiques donner le nouveau cours ? Et celle des parents qui avaient choisi l’encadrement pédagogique alternatif pour sa neutralité ? À moins que tout se passe dans l’indifférence générale… »

Pour M. Buelens, « confier ce cours aux titulaires de classe aurait été idéal. La citoyenneté en primaire doit s’ancrer dans le vécu. Les instituteurs qui ont donné l’encadrement alternatif en 5e et 6 primaire l’an dernier se sont dits impressionnés par les centres d’intérêt, la réflexion, le bon sens manifestés par les enfants ».

C. M.