Magazine PROF n°24
Dossier Écoles & CPMS, partenaires privilégiés
Écoles & CPMS, partenaires privilégiés
Article publié le 01 / 12 / 2014.
CPMS et écoles ont une belle collaboration, dans la plupart des cas. Ce dossier en atteste. Même si celle-ci va de soi, deux décrets entrés en vigueur en septembre invitent les unes et les autres à la retravailler. Dans quel sens ? C’est l’objet de ce dossier.
Pour accompagner les élèves et leurs familles, le Centre PMS (CPMS) est le partenaire privilégié de l’école. Ses équipes tri-disciplinaires travaillent beaucoup avec profes- seurs, éducateurs et équipes de direction. « Écoles et CPMS partagent à bien des égards des finalités et des valeurs communes, soulignent Patrick Hullebroeck et Valérie Silberberg, de la Ligue pour l’enseignement dans un dossier de 2010 (1). Ils ont en commun un public bénéficiaire autant qu’un commanditaire identique qui fixe le cadre de leur travail respectif et à qui ils doivent rendre compte. Mais en même temps, ils constituent des institutions distinctes dont le projet institutionnel et la mission diffèrent autant que les cultures professionnelles, les objectifs opérationnels et, à moyens termes, les formes d’organisation ».
Si on collabore…
Ainsi, ces partenaires, parfois, se méprennent. La demande de l’équipe éducative attend souvent une réponse rapide. Or, les CPMS, en toute indépendance, travaillent avec le jeune, à son rythme et en s’adaptant à ses valeurs. Comme l’explique Pascale Catinus, conseillère pédagogique du réseau Wallonie-Bruxelles-Enseignement (lire « Des clés pour un partenariat fructueux »), pour que les choses se passent bien, des conditions sont nécessaires : écoute et confiance des directions, stabilité des équipes, culture de la concertation, connaissance des missions, contraintes, conditions de travail respectives…
De plus, montrer la cohérence de l’accompagnement favorise aussi une bonne relation. Pour cela, il faut rappeler sans cesse les missions, le cadre de travail, la méthodologie. « Un travail de longue haleine, commente Isabelle Sauvage, directrice du CPMS-PSE provincial de Beauraing-Dinant. Nous devons d’abord être clairs, nous-mêmes, avec nos missions. Ensuite, nous rendre visibles » (lire « Sortir de l'ombre »).
« Avec les directions, nous devons pointer nos difficultés, nos besoins, nos projets. Nous devons communiquer avec les enseignants, les classes, les familles. Nos permanences, qui ne sont pas possibles partout, sont aussi un moyen de relai et d’identification. Et tant mieux si nous avons un local à disposition ».
Un nouveau cadre
Depuis le 1er septembre, deux décrets initiés par les ministres de l’Enseignement et de l’Aide à la Jeunesse du précédent Gouvernement (re)formalisent la collaboration entre les chefs d’établissement, les CPMS et les partenaires externes. Un décret, sectoriel, redéfinit les rôles du CPMS, des services d’accrochage scolaire, des équipes mobiles et des médiateurs et leur articulation. L’autre décret, intersectoriel, met en place différents niveaux de collaboration entre Enseignement et Aide à la jeunesse, de l’école jusqu’à un Comité de pilotage.
Par ailleurs, « le texte relatif aux missions des CPMS, de 2006, a été modifié, explique Sophie De Kuyssche, secrétaire générale de la Fédération des CPMS libres (2). Il place les CPMS, à l’interface entre école, familles et élèves d’un côté, environnement scolaire et intervenants extérieurs de l’autre, avec obligation d’assurer un lien entre les différentes ressources utiles à l’enfant… » (lire « Partenariats autour de l’élève : la donne change »)
Fondamentalement peu de choses changent. Formellement les collaborations autour de l’école sont mieux définies. Le chef d’établissement coordonne tous ces services ; ou le CPMS, en concertation avec lui.
Certains verront peut-être dans cette réforme une volonté d’économie. On vise le mieux faire et la meilleure réussite des élèves, sans budget spécifique supplémentaire. D’autres y trouveront une volonté de mieux piloter le système. Notons que toute formalisation introduit la possibilité d’une objectivation et donc d’une évaluation et d’une réadaptation.
Le Conseil supérieur des CPMS estime, lui, que ce nouveau cadre donne davantage de sens et de cohérence à l’accompagnement. Selon quelques coups de sonde vers les écoles, les chefs d’établissement sont conscients qu’il vise à améliorer l’efficacité. Certains estiment que cela peut entrer en tension avec la mise en place d’une nouvelle couche de lasagne, qui va demander du temps et des efforts.
Causes et antécédents
D’autant plus que cet esprit de collaboration efficace écoles-CPMS existait évidemment avant ces décrets. Et que les CPMS avaient déjà très souvent développé un maillage vers des partenaires externes : associations d’aide en milieu ouvert, centres publics d’aide sociale, services d’aide à la jeunesse, services de protection de la jeunesse, centres de guidance, écoles de devoirs, centres de santé mentale, plannings familiaux, l’ONE… Depuis plusieurs années, c’est devenu une nécessité : les problèmes des jeunes auxquels sont confrontés les CPMS ne cessent de se complexifier.
Mais tout système peut comporter des bugs. Michèle Demeuse, coordonnatrice du Service d’Inspection des CPMS. « Il pouvait arriver, parce que le directeur de l’école n’avait pas le temps ou qu’il n’y avait pas pensé, que des partenaires externes à l’école y entrent sans que le CPMS en soit averti. Dorénavant, l’avertir devient la règle : il peut gérer l’avant et l’après animation, il peut aussi y collaborer ». D’autre part, en l’absence d’une vraie formalisation, il pouvait arriver aussi que, dans certains cas, chacun des partenaires de l’école fasse un peu de tout. Certains y verront une qualité : la souplesse.
Un cadre plus large
Le nouveau cadre vise à mieux faire fonctionner les rouages entre eux. D’autres initiatives participent au même enjeu, comme le Plan d’action visant à garantir un apprentissage serein (PAGAS), le Guide pratique relatif à la prévention et à la gestion des violences en milieu scolaire, la création d’un numéro vert « École et Parents »,… Et, d’autre part, il fait partie d’un rapprochement de politiques entre les secteurs enseignement et aide à la jeunesse.
Augmenter le nombre de partenaires, cela augmente la nécessité de formaliser. Mais ce nouveau cadre qui intègre l’Aide à la jeunesse pose des questions sur son application. Comment rendre effectives les collaborations sur le terrain avec l’école ? Avec quelle présence ? Avec quels moyens ?
Passer de la théorie à la pratique, cela exigera de la créativité. Il faudra surmonter des craintes, par rapport à son identité, son fonctionnement actuel. Il faudra peut-être que le directeur du CPMS agence sa charge de travail autrement. S’il doit faire plus d’interface, devra-t-il moins travailler comme conseiller sur le terrain ? Et, il faudra un gros travail de communication vers les directions d’école. Bref, cela prendra du temps.
(1) Quels enjeux pour les CPMS ?, La ligue pour l’enseignement, décembre 2010 - http://bit.ly/1yaP3Nl.
(2) Entrées libres, n°92, octobre 2014, p. 5 - http://bit.ly/1Fmqwrd.
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